Roger Sperry décrit notamment le rôle singulier de chaque hémisphère cérébral dans la perception du langage et de l’espace, dans la reconnaissance des visages, les jugements de valeurs, le raisonnement ou l’affectivité. Il va jusqu’à formuler l’hypothèse que chaque hémisphère disposerait de fonctions propres, voire d’une conscience propre.
Si son œuvre est incontournable en psychobiologie, l’implication qu’elle entraîne dans les liens entre le physique et le psychique, font que ses positions philosophiques ont choqué.
Bien sûr c’est ce qui a choqué qui nous intéresse. L’hypothèse ci-dessus est souvent décriée, le plus souvent au moyen d’arguments non pas scientifiques, mais affectifs. En effet, comment prouver l’inexistence de quelque chose ? Quand l’épistémologie s’effondre, il reste la violence ou la ruse.
Cependant, de façon purement quantitative, une fonction peut mobiliser de façon plus étendue une région d’un hémisphère plutôt qu’un autre. Il y a alors un biais en faveur d’un hémisphère cérébral, mais il n’existe pas de latéralisation totale. La plupart des tâches nécessitent la collaboration des deux hémisphères cérébraux. Il n’existe donc pas véritablement d’asymétrie fonctionnelle entre les deux hémisphères cérébraux.
Le surlignage en jaune nous ramène exactement à la propriété élémentaire du couple yin yang, notre référence : jamais l’un sans l’autre.
Par contre la déduction en surlignage rouge est fautive. Elle sous-entend que si la latéralisation n’est pas totale, c’est qu’elle n’est pas véritable. Epistémologiquement ça ne tient pas, c’est de la rhétorique. Le commentateur ajoute une notion que l’auteur n’a pas mise, l’aspect tranché, qui est pourtant contredit dans la phrase précédente. C’est un déni postural maquillé dont le simple survol donnera à penser que logiquement l’asymétrie n’existe pas.
Pour qu’elle fonctionne je l’ai modifiée en :
Il n’existe donc pas
véritablementd’asymétrie fonctionnelle totale entre les deux hémisphères cérébraux
Du coup c’est une paraphrase qui n’apporte rien, ou encore un truisme.
l’asymétrie cérébrale est complexe et délicate, et nous empêche de tirer des conclusions globales
Voilà qui est mieux.
Je trouve cet exemple bien représentatif des actions contre l’hypothèse de Sperry, c’est pourquoi je le conserve ici alors que j’ai corrigé sur Wikipédia.
Certains sites se font les chantres de ce type de l’incompréhension épistémologique qui abrite des postures a priori ne faisant aucunement l’honneur de la Science. Peu ou pas de philosophie, incapacité notoire à penser en dehors des manuels de référence, révérence aveugle aux dogmes scientifiques sont quelques unes de leurs caractéristiques les plus apparentes. D’ailleurs ces sites n’ouvrent jamais leurs billets aux commentaires, ce qui est pertinent car aucune critique n’est recevable pour eux, qui se déterminent justement commes imparables, adossés qu’ils sont aux résultats de la science comme vérité absolue, mais jamais à ses doutes, ses errements ni même son évolution.
La médiatisation des « cerveau droit » et « cerveau gauche »
En 2013, une analyse scientifique rigoureuse par IRM montre qu’il ne semble pas exister de prédominance hémisphérique d’un individu à l’autre d’un point de vue fonctionnel. Cela ne remet pas en cause l’existence d’une latéralisation des fonctions cognitives, mais cette recherche montre qu’il ne semble pas exister d’individus à cerveau gauche ou cerveau droit dominant.
La critique ici est plus respectable. L’outrage épistémologique (une ou plusieurs expérience négative ne suffisent pas à invalider la thèse) est évité par l’usage deux fois répété du verbe sembler qui indique la fragilité de l’affirmation devant ses prétentions d’analyse scientifique rigoureuse, qui sait avant même d’exister qu’elle ne prouvera rien. Cette assertion « vraisemblable » vient essayer de contrer le fait caractérologie sans aucun argument, mais en semant le doute. Rhétorique encore.