Psycho­lo­gie de l’inné – 4

Je voudrais reve­nir sur le commen­ce­ment de ce sujet où je parle avec assu­rance de quatre domaines de la psycho­lo­gie de l’inné, que je classe onto­lo­gique­ment ainsi [sexe/style/race/QI] en rete­nant mon geste quand même, parce que je ne suis pas tota­le­ment assuré de cet ensemble onto­lo­gique.

D’abord je reviens sur la race pour redire que je ne frime pas là-dessus. Ça m’a l’air cohé­rent de la mettre ici, mais je n’ai pas de maté­riel onto­lo­gique autour d’une telle déter­mi­na­tion. C’est au moins aussi embrouillé d’af­fects millé­naires que le sexe et c’est sans doute encore moins étudié, du moins sans une chappe d’a priori terri­fiants liés à des critères locaux, donc à l’ab­sence de recul. Ajou­tons à cela cette manie de l’époque qui consiste à penser que ce qui n’est pas ration­nel n’existe pas et nous avons un état des lieux sur un sujet pour­tant onto­lo­gique, donc pure­ment descrip­tif et forcé­ment neutre. L’on­to­lo­gie n’est pas la morale, la morale est pres­crip­tive, elle ne peut qu’être fondée sur du descrip­tif. La race existe, les diffé­rences entre hommes de diverses ethnies existent, nier ces faits c’est faire l’au­truche et c’est empê­cher les autres de penser le réel : c’est rétro­grade et dange­reux. Ce ne sont que des jeux de pouvoir aveugles, le pouvoir sans onto­lo­gie est impuis­sant et destruc­teur, juste­ment.

Soit les races se mélangent, soit elles se dressent l’une contre l’autre. Les diades utiles à ce débat sont [altruisme/égoïsme] et [indi­vi­duel/collec­tif]. La consan­gui­nité est un puis­sant vecteur acquis de mélange, du moins jusqu’à un certain point. Ce point, le métis­sage, est lié sans doute en premier lieu à une certaine masse de popu­la­tion conte­nue au sein de fron­tières natu­relles, tels les fleuves, les montagnes, etc. Les modu­la­tions clima­tiques, les avan­cées tech­no­lo­giques, la surpo­pu­la­tion, l’au­dace, etc., font bouger les gens et tendent à anéan­tir les fron­tières natu­relles. Les groupes qui se rencontrent alors ont évolué sépa­ré­ment et les diffé­rences sont flagrantes. De manière descrip­tive [sentir], ce sont des êtres vivants, des humains comme nous. Ils savent des choses que l’on ignore et réci­proque­ment nous aussi savons des choses qu’ils ignorent. De manière pres­crip­tive [calcu­ler] il se peut qu’il y ait danger d’agres­sion, il se peut aussi qu’ils disposent de ce que nous cher­chons et qu’on puisse les spolier, et que nous soyons les agres­seurs. On se renifle, on montre les dents, on se fait des cadeaux, on se déchire. Deux camps, c’est un clas­sique : 4 situa­tions. Une fois on s’aime, trois fois on se déteste, puisqu’il suffit qu’un des groupes soit agres­sif pour que l’autre le devienne. Le Christ a dit « tend l’autre joue » ou encore « aime ton ennemi », c’était pour renver­ser la situa­tion : trois fois on s’aime, une fois on se déteste. Mais bon, on n’a pas trop utilisé ce truc en dehors des sermons ; on en est plutôt à la norme « si je ne le fais pas (agres­ser), c’est eux qui le feront », au moins c’est clair : quatre fois on se déteste. Le Christ a aussi dit que ceux qui croyaient en lui seraient sauvés, et pas les autres. Si l’on aime son ennemi en bon chré­tien, c’est pour le conver­tir, c’est une ruse pour l’ame­ner dans la « Vraie Foi ». La race est un inné qui s’en­tre­lace d’ac­quis. Évidem­ment. La reli­gion peut dépas­ser la race en dépas­sant sa voca­tion litté­rale pour deve­nir pres­crip­tive, mais elle s’y ancre néces­sai­re­ment.

Ainsi, du point de vue de la stricte survi­vance du groupe, l’étran­ger est soit l’en­nemi, soit l’es­clave et on juge de sa nais­sance comme d’un outrage person­nel : ils ont la veule­rie d’être des esclaves donc ils ne valent rien ou bien ils ont la veule­rie de nous réduire en escla­vage, donc ils ne valent rien. S’ils ne valent rien, c’est qu’ils sont infé­rieurs à nous qui sommes ainsi auto­ri­sés à les toiser de notre évidente supé­rio­rité. Cher­cher à les domi­ner n’est même pas un devoir, c’est « dans l’ordre des choses, c’est la vérité, la preuve en est que c’est écrit dans Le Grand Livre sacré : « Les autres c’est des infé­rieurs, il nous faut les remettre à leur place, c’est notre destin ! » ». Amen. Notre époque se roule dans cette fange avec délices : l’ex­cep­tion­na­lisme améri­cain domine le monde pour un instant, les Blancs, les Arabes, les Asia­tiques, les Noirs, etc., se dressent tout seuls les uns contre les autres et, quand ils oublient de le faire, il y a toujours un mani­pu­la­teur pervers de haute géos­tra­té­gie, un comman­di­taire de « haute » poli­tique, qui vient remettre des tombe­reaux d’huile systé­mique sur le feu. C’est telle­ment banal.

Là je ne fais que décrire ce monde, je ne vais pas faire de la morale, je ne fais que de l’on­to­lo­gie, et dans l’on­to­lo­gie il n’y a pas de juge­ment de valeur : tout ce qui existe est réel, perti­nent, utile comme étant une partie d’un tout qui n’est pas direc­te­ment lisible, qui est caché, obscur. Pas de nuisibles par défi­ni­tion, pas d’inu­tiles, pas de déchets de l’hu­ma­nité, etc., dans l’on­to­lo­gie, les caté­go­ries ration­nelles (de la race ou de quoi que ce soit) ne sont pas forcé­ment perti­nentes. C’est assez clair ? L’on­to­lo­gie permet d’étu­dier serei­ne­ment la race, si nous en avons telle­ment peur c’est que nous sommes psycho­lo­gique­ment malades. Et si je mets « nous », c’est que je m’in­clue dans la patho­lo­gie, seule­ment moi, je me soigne, j’es­saye. Je connais en moi ce qu’un puri­ta­nisme taré empêche de distin­guer à la verti­gi­neuse majo­rité de mes contem­po­rains : le racisme. Quelle horreur ! Je suis raciste ! Me voici cramé à vie ! Je suis détes­table, qu’on me conspue et qu’on me crache au visage dès qu’on m’aperçoit ! C’est du grand-guignol : ça serait comique si ça n’était pas aussi mons­trueux.

Je vais vous dire une chose de ma vie. J’aime rencon­trer des gens, je vais au contact, je suis aimable et atten­tif. Tout le contraire d’un misan­thrope, j’ai des tas d’amis, au sens second du terme, c’est-à-dire « des gens que j’aime et qui m’aiment ». Ce sont des gens tous très diffé­rents avec qui je partage une inti­mité stable, que je ne vois pas sur une base régu­lière comme des amis du sens premier qui sont néces­sai­re­ment beau­coup moins nombreux, eux qui sont ceux que « je connais et que j’aime quand même ». Pourquoi je vous raconte ça ? Ces gens, quand on se croise, on se sourit de tout cœur et on s’em­brasse joyeu­se­ment ; on se demande des nouvelles, on se balade, on se rencarde, on fait un restau, etc. Parmi eux il y a 20 % de magh­ré­bins, 10 % de blacks, 3 % d’asia­tiques, encore d’autres sans doute, et le reste des blancs avec un peu d’Al­le­mands et d’An­glais ou que sais-je encore et puis des nés en France, c’est-à-dire des Flamands, des Bretons, des Polo­nais, des Berbères, etc. Bon tout ça c’est super mignon, super love, mais il y a une ques­tion quand même choquante : qu’est-ce qui justi­fie ces pour­cen­tages ? Pourquoi une mino­rité de Rebeux, pourquoi si peu de blacks et d’asia­tiques ? N’au­rais-je pas un scan­da­leux problème de racisme avec ceux-là ? Mais oui ! C’est ça, ça-y est, c’est l’hor­rible Vérité qui me tombe dessus « Raciste ! », pendez-moi vite à cette branche, sans procès, pas la peine pour un sale raciste, un facho pendant qu’on y est.

Ce qui justi­fie ces pour­cen­tages est très simple, c’est le pour­cen­tage de races que je rencontre dans ma vie, dans ma ville. Pas mal de Rebeux, quelques Séné­ga­lais de mon village et autres Maliens, pas mal de jaunes en fait, mais ils sont si timides que c’est rare de pouvoir échan­ger avec eux, je le déplore. Par contre des Pollacks… pourquoi ai-je tant d’ami­tiés avec ceux-là ? Pour­tant ils sont nés français ! C’est louche ça doit être du racisme à l’en­vers.

Dans cette petite diatribe des pour­cen­tages, ce n’est pas du racisme dont je parle, c’est de son contraire, et c’est parti­cu­liè­re­ment choquant que ce ne soit jamais asso­cié au sujet du racisme. Je ne comprends pas que quand quelqu’un de bien français de souche et même du genre bien à droite dit « j’ai des amis arabes », on se moque de son argu­ment et on essaye de lui faire honte de l’avoir tenu, de le ridi­cu­li­ser. Pour­tant c’est un fait radi­cal que la diffé­rence raciale n’a pour ainsi dire aucune inci­dence d’un point de vue indi­vi­duel. Sans poser cette partie de la ques­tion, comment oser abor­der l’autre ?

Le racisme dans les diction­naires est une idéo­lo­gie malfai­sante, mais voilà, cette défi­ni­tion masque le fait qu’il existe une réac­tion natu­relle à la diffé­rence entre les êtres que nous serions avisés d’ad­mettre. Les rapports entre les êtres peuvent être telle­ment divers, de la symbiose, au fait d’être de la nour­ri­ture, à l’in­dif­fé­rence, etc. Le racisme est juste l’un de ces rapports que l’on ne peut pas éluder sous une étiquette qui n’abrite en réalité que de l’opi­nion. Il faut chan­ger le plan de réflexion.

Ques­tion, quel est le contraire du racisme, comment signer [/racisme] ? Comment étudier le racisme si on ne connaît pas son contraire ? Voilà, nous sommes factuel­le­ment tous plus ou moins secs devant cette ques­tion parce que le problème est mal posé, il serait plus juste de dire qu’il est résolu d’avance, c’est un mal à éradiquer, enfin juste dans les discours parce que dans les faits… L’« anti­ra­cisme » est un mot bien­pen­sant, inutile et mal foutu, le « racisme à l’en­vers » est encore pire, c’est un renver­se­ment, une perver­sion, une auto­pu­ni­tion qui favo­rise tout ce qui n’est pas nous-mêmes, sous des odeurs de vertu faus­saire.

Deux anto­nymes sont propo­sés dans les diction­naires, le cosmo­po­li­tisme qui est une réponse idéo­lo­gique à une ques­tion idéo­lo­gique. Pas trop mal dans ce cadre un peu bancal (les anto­nymes du cosmo­po­li­tisme ne comprennent pas le racisme, allez comprendre), mais pas dans l’on­to­lo­gique. Le second est la frater­nité, ce qui est loin d’être onto­lo­gique­ment parfait, mais en atten­dant je n’ai jamais trouvé mieux. La frater­nité nous ramène plei­ne­ment à notre sujet puisqu’il s’agit en premier lieu d’un lien de parenté au sein d’une lignée. Mais ceci pose un très gros problème à notre signa­ture : l’éty­mo­lo­gie de « race » comme celle de « frater­nité » remonte à la lignée. Au sens premier, être frater­nel c’est être raciste et réci­proque­ment… On aime ceux de sa lignée et on déteste ceux des autres lignées.

Par défi­ni­tion la frater­nité est aussi un lien étroit d’ami­tié, ce qui fait que dans ce second cas, on peut être frater­nel sans être raciste. C’est d’ailleurs cette accep­tion qui est sous-enten­due partout, en contra­dic­tion avec la première, selon laquelle soit on est frater­nel, soit on est raciste, mais pas les deux.

Mais alors, que veut dire être raciste, onto­lo­gique­ment ? Je n’ai pas les compé­tences linguis­tiques et séman­tiques pour répondre à cette ques­tion, je peux juste réflé­chir. Si le peuple voisin à l’ha­bi­tude de faire des razzias chez moi depuis des éter­ni­tés, je remarque tout de suite la forme de l’œil, la couleur des cheveux, du gars que je croise dans mon pâtu­rage et du coup, je prends mon bâton avant de m’en appro­cher pour lui deman­der ce qu’il veut, sur un ton osten­si­ble­ment méfiant. Je suis une gazelle, quand je vois une criniè­re… Le racisme a une fonc­tion, c’est un outil de survie de type [sentir/calcu­ler], en faire un inter­dit ou une péjo­ra­tion est désas­treux.

Nous avons donc un fort bancal [cosmo­po­li­tisme/racisme] et un autre qui l’est un peu moins [frater­nité/racisme] qui semblent rimer plus ou moins natu­rel­le­ment avec [indi­vi­duel/collec­tif] et [altruiste/égoïste]. Il me semble que nous sommes en plein trait alpha sur toute la problé­ma­tique et que le problème est posé par notre époque comme s’il n’avait rien à voir avec l’être, mais tout de l’idée selon le trait bêta. Je suis peut-être passé à côté d’un autre mot, d’une autre dualité pour parler de la race, mais c’est ce qui m’est donné. Là encore il semble que les diction­naires soient à prendre avec des pincettes et que l’éty­mo­lo­gie reste notre ultime valeur de réfé­rence. Il y a un travail à produire que je ne fais que pres­sen­tir à travers le lien onto­lo­gique. C’est d’au­tant plus impor­tant de le faire que ce mot est piégé sous un groupe-réflexe pavlo­vien incons­cient, ultra­sen­sible et hyper­dan­ge­reux.

Tout ce que je sais là-dessus, je le sais de ma propre obser­va­tion : j’ai des amis de toutes les couleurs et je me méfie parfois de certains groupes d’êtres. C’est diffi­cile d’étu­dier cette défiance, elle semble plutôt acquise par l’ex­pé­rience s’ac­co­lant à des critères innés. Une chose me paraît sûre : les traits distinc­tifs d’un groupe d’êtres sont innés, ils déter­minent la race. Le fait d’as­so­cier des méfaits à une race donnée et donc de la juger malfai­sante ou infé­rieure ou tout ce qu’on voudra se nomme le racisme. Il y a un net glis­se­ment de sens entre race et racisme, mais les deux dési­gnent des concepts du réel, des éléments défi­ni­tion­nels de l’en­vi­ron­ne­ment. Ni l’un ni l’autre ne sont mauvais en eux-mêmes, ce sont des outils du vivant. Je ne vois vrai­ment pas pourquoi il faudrait en faire un élément de stig­ma­ti­sa­tion des bons contre les méchants. Aux lacunes des diction­naires s’ajoute de l’ins­tru­men­ta­tion rhéto­rique. Corri­gez les unes et les autres s’ef­fon­dre­ront pour ce qu’elles sont, des escroque­ries.

Vous remarquez que ce n’est pas mon sujet, le racisme et que pour­tant j’en parle. Je suis obligé comme souvent d’al­ler recher­cher le sens juste des mots pour empê­cher les clau­di­ca­tions rituelles désas­treuses de mon époque. Tout ça, c’est de la précau­tion oratoire, du bris de caco­pho­nie. Mon sujet, ma ques­tion plutôt, c’est : existe-t-il des diffé­rences innées entre les races d’hommes (ou d’autres espèces d’ailleurs) que l’on pour­rait saisir à travers quelques caté­go­ries onto­lo­giques formant un tout ? Je ne sais pas en fait. Je peux y réflé­chir tranquille­ment, après tout je croise des humains de tous styles et origines. Mais c’est diffi­cile, car on ne parle plus d’in­di­vi­dus, on parle de groupes, ce qui veut dire aussi une culture. Distin­guer la culture de l’inné chez un peuple diffé­rent, c’est impos­sible sans aller ailleurs.

Je ne vais plus dire ce que je ne sais pas, je vais dire ce que je sais. Envi­sa­ger les gens, pour moi, c’est cher­cher le type psycho­lo­gique inné, c’est un jeu de mots avec dévi­sa­ger. Le fait est qu’il m’est bien plus aisé de déter­mi­ner le style pour un Français blanc que pour toute autre personne d’ori­gine diffé­rente. Je pour­rais presque étendre cette caté­go­rie aux Occi­den­taux blancs, mais il y a des limites à la chose. Pourquoi cette aisance ? Parce que je connais quelque chose d’eux que je ne connais pas aussi bien pour les autres peuples du monde. Quelle est cette chose ? La réponse à cette ques­tion vient propo­ser une certaine hypo­thèse de travail : chaque peuple a sa typo­lo­gie psycho­lo­gique onto­lo­gique. Là, remarquez que je ne mets pas « innée », car c’est ça le problème avec cette hypo­thèse, elle pour­rait bien se réfé­rer à de l’ac­quis, c’est bien ce qu’il semble parfois, mais pas toujours.

Soyons clairs, le style psy des peuples est une hypo­thèse que j’em­ploie dans ce cadre pour caté­go­ri­ser les races, mais c’est d’abord une réalité pour moi, qu’elle ait ou non une compo­sante innée ou encore raciale. Cette ques­tion, toute l’on­to­lo­gie me dit que « oui, bien sûr que ça colle : il y a un carac­tère inné chez les peuples », mais rappe­lez-vous, je suis un tâche­ron : sans penseurs je ne puis rien affir­mer. Pas de penseur pour l’heure, donc je me borne à affir­mer ce carac­tère sans affir­mer son innéité, tout en étant persuadé qu’il est à la fois inné et acquis. Non, ce n’est pas compliqué ; oui, c’est rigou­reux. Partant de ce prin­cipe je n’ai pas de diffi­culté à expliquer pourquoi c’est plus déli­cat d’en­vi­sa­ger une personne d’un autre peuple : sa typo­lo­gie est brouillée, car elle est enco­dée avec celle de son pays que je ne connais pas aussi bien que celle du mien. J’ai appris à partir de mon peuple, évidem­ment ! Si je vivais dix années en Chine à laquelle j’at­tri­bue le style [poète] ou [irra­tion­nel/intel­lec­tuel], je fini­rais par distin­guer aussi vite qu’en France un [roi] d’un [poète], mais en atten­dant je dois bien mieux connaître la personne et l’ob­ser­ver très fine­ment, parce que je dois réflé­chir, là préci­sé­ment, au style de son peuple, de sa race pour pouvoir seule­ment comprendre le style de qui est face à moi.

Voilà, cette piste pour décan­ter l’in­néité de la race, avec ou sans racisme, est juste passion­nante, j’y revien­drai, mais rappe­lez-vous à son abord, de faire gaffe à ne pas entrer les pieds crot­tés dans un espace onto­lo­gique sacré en gueu­lant que c’est crade.

Encore une chose sur le sexe. La quête de l’idéal fémi­nin est bien seule sans son double, l’idéal mascu­lin. Tout se passe comme si le second étant réalisé, il n’est plus besoin d’en parler. C’est le contraire, si on en trouve un, forcé­ment on trouve l’autre. Point final. Des ouver­tures fameuses existent là-dessus, bien plus que sur la race. Mais il faut encore affron­ter les mots dévoyés sur la route. Ici, je passe par celui de para­doxe, cette futi­lité du Scien­ti­fique à qui il arrache un sourire de conten­te­ment, comme s’il s’agis­sait d’une gour­man­dise, alors qu’il devrait le rendre modeste puisqu’il indique la certi­tude qu’on n’a rien compris à un certain moment. De base, le para­doxe indique très souvent la poly­sé­mie d’un terme que l’on emploie dans une phrase ayant toute l’ap­pa­rence de la ratio­na­lité déduc­tive et menant à une contra­dic­tion flagrante, alors que le même mot n’a tout bête­ment pas le même sens dans les deux propo­si­tions. C’est au pire du niveau BAC (de mon époque) et ça désa­morce les trois quarts des para­doxes. Les para­doxes scien­ti­fiques indiquent au cher­cheur qu’il peut amélio­rer sa théo­rie, et cette histoire de poly­sé­mie devrait être son premier réflexe, peut-être a-t-il confondu deux contextes parce qu’ils sont dési­gnés par un seul mot non encore discerné.

Sur le sexe on a affaire souvent au premier genre de para­doxe : on va trou­ver de bonnes idées de l’idéal fémi­nin chez Nietzsche par exemple, alors qu’il a des phrases d’un machiste viru­lent dans tel ou tel passage. Il n’y a aucun blocage pour réflé­chir là-dedans, et pour­tant on va entendre hurler que Nietzsche déteste les femmes et qu’il faut le brûler. Une réflexion super­fi­cielle de quelques-uns va empê­cher tout le monde de penser un sujet aussi impor­tant que celui-là. La place de Marie et d’Ève dans l’Église Catho­lique est de cet ordre aussi peu para­doxal et tout aussi abru­tis­sant.

La solu­tion à cet atroce, cet inso­luble dilemme, comme d’ha­bi­tude, est dans l’on­to­lo­gie formelle. Nietzche a rencon­tré un certain nombre de femmes qu’il a méju­gées en vrac. Même si ses mots semblent peut-être dire le contraire, ce n’est pas les femmes qu’il juge, c’est les femmes de son époque, donc de sa culture, donc de l’ac­quis.

« On devrait mieux respec­ter la pudeur avec laquelle la nature s’est cachée derrière les énigmes et de multi­co­lores incer­ti­tudes. Peut-être la vérité est-elle une femme, qui est fondée à ne pas lais­ser voir son fonde­ment ?… ». C’est bourré de jeu de mots, mais c’est bourré de sagesse antique, car il fait réfé­rence à Isis, ce qui pour moi revient inéluc­ta­ble­ment à la dyade alpha [ordre/désordre], le fémi­nin est de cet ordre premier et obscur, secret et jaillis­sant. Atten­tions, soyez bien sûr de me suivre, c’est de l’on­to­lo­gie, ce n’est pas du décor­ti­cage, l’im­por­tant c’est d’« avoir une idée ».

Ce passage à la toute fin du Nietzsche contre Wagner de chez Flam­ma­rion ouvre à des commen­taires parfai­te­ment géniaux pour moi d’Éric Blon­del dans sa note 111. Cela va bien plus loin que le simple éter­nel fémi­nin, c’est la sagesse du monde qui se trans­forme à une époque en philo­so­phie, mais les deux débats sont intriqués, la sagesse est analo­gique­ment la fémi­nité et réci­proque­ment.

« Déva­lo­ri­ser le sensible, les appa­rences, donc aussi l’art, au profit d’une raison qui se croit habi­li­tée à aller voir l’en-soi, la vérité cachée des choses, l’Être. Invoquant donc les Grecs préso­cra­tiques, ceux d’avant la déca­dence de l’hel­lé­nisme, c’est-à-dire les « Sages », les philo­sophes de la nature, Héra­clite Anaxi­mandre, mais surtout les Grecs de l’époque tragique (celle d’Eschyle et de Sophocle — Euri­pide est un socra­tique, ration­nel, déca­dent !), Nietzsche prétend « renver­ser le plato­nisme en déva­lo­ri­sant le logos, la conscience, le savoir, l’en-soi, le Vrai, tout ce qui se tient, […] »

« Si la Vie est femme, il est méta­phy­sique de croire à une Vérité sous les voiles et les amours (« l’éter­nel fémi­nin ») alors que la Vie n’est en fait rien d’autre que le deve­nir inces­sant des appa­rences : la vie-femme n’est pas appa­rence trom­peuse, mais deve­nir inépui­sable et sans fond de ses appa­ri­tions. »

Je vois avec un plai­sir immense Nietzsche qui fait du problème [femme/homme] le même problème que [sagesse/raison], qui nous tient prison­nier depuis 2500 ans. Et il a parfai­te­ment raison, il est au sommet de la montagne. Selon mes termes il parle de l’al­pha, qu’il croque avec son génie d’une analo­gie entre deux sujets telle­ment distants et pour­tant telle­ment le même sujet, forcé­ment.

La femme est dérai­son­nable, irra­tion­nelle, voilà l’éter­nel fémi­nin ! Évidem­ment je le dis dit d’une façon qui provoque l’époque, ce qui ne peut que choquer tous les pensants sans rien d’autre que la norme nihi­liste, cet infâme brouet. Le problème ce n’est pas que le fémi­nin soit irra­tion­nel, le problème c’est que la moitié de la popu­la­tion fait croire à toute la popu­la­tion que « c’est mal d’être irra­tion­nel que l’ave­nir de l’hu­ma­nité passe par l’éra­di­ca­tion de l’ir­ra­tio­na­lité, qui est bien commen­cée, on bosse là-dessus, remer­ciez-nous, etc. », tout le bla-bla des stéri­li­sa­teurs fiers de l’être de ce monde. Ce monde appar­tient à tous, pas qu’à eux. Il est bien plus beau qu’ils ne voudraient nous le faire croire, si c’est nous qu’il faut d’abord chan­ger pour chan­ger le monde, c’est eux tout de suite après, soyons fous : en même temps ! Théra­pie !

La reli­gion donc a aussi sa petite méchan­ceté. Elle a Marie qui est au pinacle pour une forte part de la chré­tienté, mais qui n’a pas les honneurs de la trinité, plato­ni­cienne, comme ça ce n’est pas de notre fait, c’est la loi de la nature que la femme reste à la porte, n’est-ce pas ? Ceci dit, encore un peu d’éner­ve­ment, si on lit les textes chré­tiens, Marie est bien proche de l’Isis, voire même adulée bien au-delà et dont tous les attri­buts sont ceux du mystère, du caché, etc. Elle a le poste, mais pas la paye, on va dire, c’est toujours le cas pour la femme d’ailleurs. Par contre avec Ève on peut se lâcher. L’on­to­lo­gie est renver­sée puisque l’homme est premier, c’est de sa côte que nait une Ève presque subal­terne (c’est tech­nique, on en aura besoin après, pour avoir des fils), mais elle se rend utile comme coupable : avant elle c’était mieux, elle a tout gâché.

Ce texte, je l’ai craché une première fois et je n’ai pas osé le publier en l’état, trop d’af­fects, de pathos : je l’ai réécrit. Comme toujours, j’ai avancé en écri­vant, c’est-à-dire que j’ai changé des affir­ma­tions la seconde fois parce que j’ai réflé­chi mieux à ce que j’avais affirmé et j’ai eu la nette impres­sion qu’une troi­sième écri­ture ne serait pas du luxe. Sur la race je n’ai pas fini, sur le sexe, je n’ai pas fini, etc. La psycho­lo­gie de l’inné prend une place folle dans notre monde de tous les jours, mais pas dans la reli­gion du temps, la Science. On a oublié qu’on vivait nos pensées, persua­dés que la pensée est le commen­ce­ment et la fin, ce bug plato­ni­cien qu’hier soir encore je véri­fiais chez deux amis, l’un saltim­banque, l’autre profes­seur de mathé­ma­tiques : « mais non, la pensée est première ! », quoique j’ai pu dire.

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