Je voudrais revenir sur le commencement de ce sujet où je parle avec assurance de quatre domaines de la psychologie de l’inné, que je classe ontologiquement ainsi [sexe/style/race/QI] en retenant mon geste quand même, parce que je ne suis pas totalement assuré de cet ensemble ontologique.
D’abord je reviens sur la race pour redire que je ne frime pas là-dessus. Ça m’a l’air cohérent de la mettre ici, mais je n’ai pas de matériel ontologique autour d’une telle détermination. C’est au moins aussi embrouillé d’affects millénaires que le sexe et c’est sans doute encore moins étudié, du moins sans une chappe d’a priori terrifiants liés à des critères locaux, donc à l’absence de recul. Ajoutons à cela cette manie de l’époque qui consiste à penser que ce qui n’est pas rationnel n’existe pas et nous avons un état des lieux sur un sujet pourtant ontologique, donc purement descriptif et forcément neutre. L’ontologie n’est pas la morale, la morale est prescriptive, elle ne peut qu’être fondée sur du descriptif. La race existe, les différences entre hommes de diverses ethnies existent, nier ces faits c’est faire l’autruche et c’est empêcher les autres de penser le réel : c’est rétrograde et dangereux. Ce ne sont que des jeux de pouvoir aveugles, le pouvoir sans ontologie est impuissant et destructeur, justement.
Soit les races se mélangent, soit elles se dressent l’une contre l’autre. Les diades utiles à ce débat sont [altruisme/égoïsme] et [individuel/collectif]. La consanguinité est un puissant vecteur acquis de mélange, du moins jusqu’à un certain point. Ce point, le métissage, est lié sans doute en premier lieu à une certaine masse de population contenue au sein de frontières naturelles, tels les fleuves, les montagnes, etc. Les modulations climatiques, les avancées technologiques, la surpopulation, l’audace, etc., font bouger les gens et tendent à anéantir les frontières naturelles. Les groupes qui se rencontrent alors ont évolué séparément et les différences sont flagrantes. De manière descriptive [sentir], ce sont des êtres vivants, des humains comme nous. Ils savent des choses que l’on ignore et réciproquement nous aussi savons des choses qu’ils ignorent. De manière prescriptive [calculer] il se peut qu’il y ait danger d’agression, il se peut aussi qu’ils disposent de ce que nous cherchons et qu’on puisse les spolier, et que nous soyons les agresseurs. On se renifle, on montre les dents, on se fait des cadeaux, on se déchire. Deux camps, c’est un classique : 4 situations. Une fois on s’aime, trois fois on se déteste, puisqu’il suffit qu’un des groupes soit agressif pour que l’autre le devienne. Le Christ a dit « tend l’autre joue » ou encore « aime ton ennemi », c’était pour renverser la situation : trois fois on s’aime, une fois on se déteste. Mais bon, on n’a pas trop utilisé ce truc en dehors des sermons ; on en est plutôt à la norme « si je ne le fais pas (agresser), c’est eux qui le feront », au moins c’est clair : quatre fois on se déteste. Le Christ a aussi dit que ceux qui croyaient en lui seraient sauvés, et pas les autres. Si l’on aime son ennemi en bon chrétien, c’est pour le convertir, c’est une ruse pour l’amener dans la « Vraie Foi ». La race est un inné qui s’entrelace d’acquis. Évidemment. La religion peut dépasser la race en dépassant sa vocation littérale pour devenir prescriptive, mais elle s’y ancre nécessairement.
Ainsi, du point de vue de la stricte survivance du groupe, l’étranger est soit l’ennemi, soit l’esclave et on juge de sa naissance comme d’un outrage personnel : ils ont la veulerie d’être des esclaves donc ils ne valent rien ou bien ils ont la veulerie de nous réduire en esclavage, donc ils ne valent rien. S’ils ne valent rien, c’est qu’ils sont inférieurs à nous qui sommes ainsi autorisés à les toiser de notre évidente supériorité. Chercher à les dominer n’est même pas un devoir, c’est « dans l’ordre des choses, c’est la vérité, la preuve en est que c’est écrit dans Le Grand Livre sacré : « Les autres c’est des inférieurs, il nous faut les remettre à leur place, c’est notre destin ! » ». Amen. Notre époque se roule dans cette fange avec délices : l’exceptionnalisme américain domine le monde pour un instant, les Blancs, les Arabes, les Asiatiques, les Noirs, etc., se dressent tout seuls les uns contre les autres et, quand ils oublient de le faire, il y a toujours un manipulateur pervers de haute géostratégie, un commanditaire de « haute » politique, qui vient remettre des tombereaux d’huile systémique sur le feu. C’est tellement banal.
Là je ne fais que décrire ce monde, je ne vais pas faire de la morale, je ne fais que de l’ontologie, et dans l’ontologie il n’y a pas de jugement de valeur : tout ce qui existe est réel, pertinent, utile comme étant une partie d’un tout qui n’est pas directement lisible, qui est caché, obscur. Pas de nuisibles par définition, pas d’inutiles, pas de déchets de l’humanité, etc., dans l’ontologie, les catégories rationnelles (de la race ou de quoi que ce soit) ne sont pas forcément pertinentes. C’est assez clair ? L’ontologie permet d’étudier sereinement la race, si nous en avons tellement peur c’est que nous sommes psychologiquement malades. Et si je mets « nous », c’est que je m’inclue dans la pathologie, seulement moi, je me soigne, j’essaye. Je connais en moi ce qu’un puritanisme taré empêche de distinguer à la vertigineuse majorité de mes contemporains : le racisme. Quelle horreur ! Je suis raciste ! Me voici cramé à vie ! Je suis détestable, qu’on me conspue et qu’on me crache au visage dès qu’on m’aperçoit ! C’est du grand-guignol : ça serait comique si ça n’était pas aussi monstrueux.
Je vais vous dire une chose de ma vie. J’aime rencontrer des gens, je vais au contact, je suis aimable et attentif. Tout le contraire d’un misanthrope, j’ai des tas d’amis, au sens second du terme, c’est-à-dire « des gens que j’aime et qui m’aiment ». Ce sont des gens tous très différents avec qui je partage une intimité stable, que je ne vois pas sur une base régulière comme des amis du sens premier qui sont nécessairement beaucoup moins nombreux, eux qui sont ceux que « je connais et que j’aime quand même ». Pourquoi je vous raconte ça ? Ces gens, quand on se croise, on se sourit de tout cœur et on s’embrasse joyeusement ; on se demande des nouvelles, on se balade, on se rencarde, on fait un restau, etc. Parmi eux il y a 20 % de maghrébins, 10 % de blacks, 3 % d’asiatiques, encore d’autres sans doute, et le reste des blancs avec un peu d’Allemands et d’Anglais ou que sais-je encore et puis des nés en France, c’est-à-dire des Flamands, des Bretons, des Polonais, des Berbères, etc. Bon tout ça c’est super mignon, super love, mais il y a une question quand même choquante : qu’est-ce qui justifie ces pourcentages ? Pourquoi une minorité de Rebeux, pourquoi si peu de blacks et d’asiatiques ? N’aurais-je pas un scandaleux problème de racisme avec ceux-là ? Mais oui ! C’est ça, ça-y est, c’est l’horrible Vérité qui me tombe dessus « Raciste ! », pendez-moi vite à cette branche, sans procès, pas la peine pour un sale raciste, un facho pendant qu’on y est.
Ce qui justifie ces pourcentages est très simple, c’est le pourcentage de races que je rencontre dans ma vie, dans ma ville. Pas mal de Rebeux, quelques Sénégalais de mon village et autres Maliens, pas mal de jaunes en fait, mais ils sont si timides que c’est rare de pouvoir échanger avec eux, je le déplore. Par contre des Pollacks… pourquoi ai-je tant d’amitiés avec ceux-là ? Pourtant ils sont nés français ! C’est louche ça doit être du racisme à l’envers.
Dans cette petite diatribe des pourcentages, ce n’est pas du racisme dont je parle, c’est de son contraire, et c’est particulièrement choquant que ce ne soit jamais associé au sujet du racisme. Je ne comprends pas que quand quelqu’un de bien français de souche et même du genre bien à droite dit « j’ai des amis arabes », on se moque de son argument et on essaye de lui faire honte de l’avoir tenu, de le ridiculiser. Pourtant c’est un fait radical que la différence raciale n’a pour ainsi dire aucune incidence d’un point de vue individuel. Sans poser cette partie de la question, comment oser aborder l’autre ?
Le racisme dans les dictionnaires est une idéologie malfaisante, mais voilà, cette définition masque le fait qu’il existe une réaction naturelle à la différence entre les êtres que nous serions avisés d’admettre. Les rapports entre les êtres peuvent être tellement divers, de la symbiose, au fait d’être de la nourriture, à l’indifférence, etc. Le racisme est juste l’un de ces rapports que l’on ne peut pas éluder sous une étiquette qui n’abrite en réalité que de l’opinion. Il faut changer le plan de réflexion.
Question, quel est le contraire du racisme, comment signer [/racisme] ? Comment étudier le racisme si on ne connaît pas son contraire ? Voilà, nous sommes factuellement tous plus ou moins secs devant cette question parce que le problème est mal posé, il serait plus juste de dire qu’il est résolu d’avance, c’est un mal à éradiquer, enfin juste dans les discours parce que dans les faits… L’« antiracisme » est un mot bienpensant, inutile et mal foutu, le « racisme à l’envers » est encore pire, c’est un renversement, une perversion, une autopunition qui favorise tout ce qui n’est pas nous-mêmes, sous des odeurs de vertu faussaire.
Deux antonymes sont proposés dans les dictionnaires, le cosmopolitisme qui est une réponse idéologique à une question idéologique. Pas trop mal dans ce cadre un peu bancal (les antonymes du cosmopolitisme ne comprennent pas le racisme, allez comprendre), mais pas dans l’ontologique. Le second est la fraternité, ce qui est loin d’être ontologiquement parfait, mais en attendant je n’ai jamais trouvé mieux. La fraternité nous ramène pleinement à notre sujet puisqu’il s’agit en premier lieu d’un lien de parenté au sein d’une lignée. Mais ceci pose un très gros problème à notre signature : l’étymologie de « race » comme celle de « fraternité » remonte à la lignée. Au sens premier, être fraternel c’est être raciste et réciproquement… On aime ceux de sa lignée et on déteste ceux des autres lignées.
Par définition la fraternité est aussi un lien étroit d’amitié, ce qui fait que dans ce second cas, on peut être fraternel sans être raciste. C’est d’ailleurs cette acception qui est sous-entendue partout, en contradiction avec la première, selon laquelle soit on est fraternel, soit on est raciste, mais pas les deux.
Mais alors, que veut dire être raciste, ontologiquement ? Je n’ai pas les compétences linguistiques et sémantiques pour répondre à cette question, je peux juste réfléchir. Si le peuple voisin à l’habitude de faire des razzias chez moi depuis des éternités, je remarque tout de suite la forme de l’œil, la couleur des cheveux, du gars que je croise dans mon pâturage et du coup, je prends mon bâton avant de m’en approcher pour lui demander ce qu’il veut, sur un ton ostensiblement méfiant. Je suis une gazelle, quand je vois une crinière… Le racisme a une fonction, c’est un outil de survie de type [sentir/calculer], en faire un interdit ou une péjoration est désastreux.
Nous avons donc un fort bancal [cosmopolitisme/racisme] et un autre qui l’est un peu moins [fraternité/racisme] qui semblent rimer plus ou moins naturellement avec [individuel/collectif] et [altruiste/égoïste]. Il me semble que nous sommes en plein trait alpha sur toute la problématique et que le problème est posé par notre époque comme s’il n’avait rien à voir avec l’être, mais tout de l’idée selon le trait bêta. Je suis peut-être passé à côté d’un autre mot, d’une autre dualité pour parler de la race, mais c’est ce qui m’est donné. Là encore il semble que les dictionnaires soient à prendre avec des pincettes et que l’étymologie reste notre ultime valeur de référence. Il y a un travail à produire que je ne fais que pressentir à travers le lien ontologique. C’est d’autant plus important de le faire que ce mot est piégé sous un groupe-réflexe pavlovien inconscient, ultrasensible et hyperdangereux.
Tout ce que je sais là-dessus, je le sais de ma propre observation : j’ai des amis de toutes les couleurs et je me méfie parfois de certains groupes d’êtres. C’est difficile d’étudier cette défiance, elle semble plutôt acquise par l’expérience s’accolant à des critères innés. Une chose me paraît sûre : les traits distinctifs d’un groupe d’êtres sont innés, ils déterminent la race. Le fait d’associer des méfaits à une race donnée et donc de la juger malfaisante ou inférieure ou tout ce qu’on voudra se nomme le racisme. Il y a un net glissement de sens entre race et racisme, mais les deux désignent des concepts du réel, des éléments définitionnels de l’environnement. Ni l’un ni l’autre ne sont mauvais en eux-mêmes, ce sont des outils du vivant. Je ne vois vraiment pas pourquoi il faudrait en faire un élément de stigmatisation des bons contre les méchants. Aux lacunes des dictionnaires s’ajoute de l’instrumentation rhétorique. Corrigez les unes et les autres s’effondreront pour ce qu’elles sont, des escroqueries.
Vous remarquez que ce n’est pas mon sujet, le racisme et que pourtant j’en parle. Je suis obligé comme souvent d’aller rechercher le sens juste des mots pour empêcher les claudications rituelles désastreuses de mon époque. Tout ça, c’est de la précaution oratoire, du bris de cacophonie. Mon sujet, ma question plutôt, c’est : existe-t-il des différences innées entre les races d’hommes (ou d’autres espèces d’ailleurs) que l’on pourrait saisir à travers quelques catégories ontologiques formant un tout ? Je ne sais pas en fait. Je peux y réfléchir tranquillement, après tout je croise des humains de tous styles et origines. Mais c’est difficile, car on ne parle plus d’individus, on parle de groupes, ce qui veut dire aussi une culture. Distinguer la culture de l’inné chez un peuple différent, c’est impossible sans aller ailleurs.
Je ne vais plus dire ce que je ne sais pas, je vais dire ce que je sais. Envisager les gens, pour moi, c’est chercher le type psychologique inné, c’est un jeu de mots avec dévisager. Le fait est qu’il m’est bien plus aisé de déterminer le style pour un Français blanc que pour toute autre personne d’origine différente. Je pourrais presque étendre cette catégorie aux Occidentaux blancs, mais il y a des limites à la chose. Pourquoi cette aisance ? Parce que je connais quelque chose d’eux que je ne connais pas aussi bien pour les autres peuples du monde. Quelle est cette chose ? La réponse à cette question vient proposer une certaine hypothèse de travail : chaque peuple a sa typologie psychologique ontologique. Là, remarquez que je ne mets pas « innée », car c’est ça le problème avec cette hypothèse, elle pourrait bien se référer à de l’acquis, c’est bien ce qu’il semble parfois, mais pas toujours.
Soyons clairs, le style psy des peuples est une hypothèse que j’emploie dans ce cadre pour catégoriser les races, mais c’est d’abord une réalité pour moi, qu’elle ait ou non une composante innée ou encore raciale. Cette question, toute l’ontologie me dit que « oui, bien sûr que ça colle : il y a un caractère inné chez les peuples », mais rappelez-vous, je suis un tâcheron : sans penseurs je ne puis rien affirmer. Pas de penseur pour l’heure, donc je me borne à affirmer ce caractère sans affirmer son innéité, tout en étant persuadé qu’il est à la fois inné et acquis. Non, ce n’est pas compliqué ; oui, c’est rigoureux. Partant de ce principe je n’ai pas de difficulté à expliquer pourquoi c’est plus délicat d’envisager une personne d’un autre peuple : sa typologie est brouillée, car elle est encodée avec celle de son pays que je ne connais pas aussi bien que celle du mien. J’ai appris à partir de mon peuple, évidemment ! Si je vivais dix années en Chine à laquelle j’attribue le style [poète] ou [irrationnel/intellectuel], je finirais par distinguer aussi vite qu’en France un [roi] d’un [poète], mais en attendant je dois bien mieux connaître la personne et l’observer très finement, parce que je dois réfléchir, là précisément, au style de son peuple, de sa race pour pouvoir seulement comprendre le style de qui est face à moi.
Voilà, cette piste pour décanter l’innéité de la race, avec ou sans racisme, est juste passionnante, j’y reviendrai, mais rappelez-vous à son abord, de faire gaffe à ne pas entrer les pieds crottés dans un espace ontologique sacré en gueulant que c’est crade.
Encore une chose sur le sexe. La quête de l’idéal féminin est bien seule sans son double, l’idéal masculin. Tout se passe comme si le second étant réalisé, il n’est plus besoin d’en parler. C’est le contraire, si on en trouve un, forcément on trouve l’autre. Point final. Des ouvertures fameuses existent là-dessus, bien plus que sur la race. Mais il faut encore affronter les mots dévoyés sur la route. Ici, je passe par celui de paradoxe, cette futilité du Scientifique à qui il arrache un sourire de contentement, comme s’il s’agissait d’une gourmandise, alors qu’il devrait le rendre modeste puisqu’il indique la certitude qu’on n’a rien compris à un certain moment. De base, le paradoxe indique très souvent la polysémie d’un terme que l’on emploie dans une phrase ayant toute l’apparence de la rationalité déductive et menant à une contradiction flagrante, alors que le même mot n’a tout bêtement pas le même sens dans les deux propositions. C’est au pire du niveau BAC (de mon époque) et ça désamorce les trois quarts des paradoxes. Les paradoxes scientifiques indiquent au chercheur qu’il peut améliorer sa théorie, et cette histoire de polysémie devrait être son premier réflexe, peut-être a-t-il confondu deux contextes parce qu’ils sont désignés par un seul mot non encore discerné.
Sur le sexe on a affaire souvent au premier genre de paradoxe : on va trouver de bonnes idées de l’idéal féminin chez Nietzsche par exemple, alors qu’il a des phrases d’un machiste virulent dans tel ou tel passage. Il n’y a aucun blocage pour réfléchir là-dedans, et pourtant on va entendre hurler que Nietzsche déteste les femmes et qu’il faut le brûler. Une réflexion superficielle de quelques-uns va empêcher tout le monde de penser un sujet aussi important que celui-là. La place de Marie et d’Ève dans l’Église Catholique est de cet ordre aussi peu paradoxal et tout aussi abrutissant.
La solution à cet atroce, cet insoluble dilemme, comme d’habitude, est dans l’ontologie formelle. Nietzche a rencontré un certain nombre de femmes qu’il a méjugées en vrac. Même si ses mots semblent peut-être dire le contraire, ce n’est pas les femmes qu’il juge, c’est les femmes de son époque, donc de sa culture, donc de l’acquis.
« On devrait mieux respecter la pudeur avec laquelle la nature s’est cachée derrière les énigmes et de multicolores incertitudes. Peut-être la vérité est-elle une femme, qui est fondée à ne pas laisser voir son fondement ?… ». C’est bourré de jeu de mots, mais c’est bourré de sagesse antique, car il fait référence à Isis, ce qui pour moi revient inéluctablement à la dyade alpha [ordre/désordre], le féminin est de cet ordre premier et obscur, secret et jaillissant. Attentions, soyez bien sûr de me suivre, c’est de l’ontologie, ce n’est pas du décorticage, l’important c’est d’« avoir une idée ».
Ce passage à la toute fin du Nietzsche contre Wagner de chez Flammarion ouvre à des commentaires parfaitement géniaux pour moi d’Éric Blondel dans sa note 111. Cela va bien plus loin que le simple éternel féminin, c’est la sagesse du monde qui se transforme à une époque en philosophie, mais les deux débats sont intriqués, la sagesse est analogiquement la féminité et réciproquement.
« Dévaloriser le sensible, les apparences, donc aussi l’art, au profit d’une raison qui se croit habilitée à aller voir l’en-soi, la vérité cachée des choses, l’Être. Invoquant donc les Grecs présocratiques, ceux d’avant la décadence de l’hellénisme, c’est-à-dire les « Sages », les philosophes de la nature, Héraclite Anaximandre, mais surtout les Grecs de l’époque tragique (celle d’Eschyle et de Sophocle — Euripide est un socratique, rationnel, décadent !), Nietzsche prétend « renverser le platonisme en dévalorisant le logos, la conscience, le savoir, l’en-soi, le Vrai, tout ce qui se tient, […] »
« Si la Vie est femme, il est métaphysique de croire à une Vérité sous les voiles et les amours (« l’éternel féminin ») alors que la Vie n’est en fait rien d’autre que le devenir incessant des apparences : la vie-femme n’est pas apparence trompeuse, mais devenir inépuisable et sans fond de ses apparitions. »
Je vois avec un plaisir immense Nietzsche qui fait du problème [femme/homme] le même problème que [sagesse/raison], qui nous tient prisonnier depuis 2500 ans. Et il a parfaitement raison, il est au sommet de la montagne. Selon mes termes il parle de l’alpha, qu’il croque avec son génie d’une analogie entre deux sujets tellement distants et pourtant tellement le même sujet, forcément.
La femme est déraisonnable, irrationnelle, voilà l’éternel féminin ! Évidemment je le dis dit d’une façon qui provoque l’époque, ce qui ne peut que choquer tous les pensants sans rien d’autre que la norme nihiliste, cet infâme brouet. Le problème ce n’est pas que le féminin soit irrationnel, le problème c’est que la moitié de la population fait croire à toute la population que « c’est mal d’être irrationnel que l’avenir de l’humanité passe par l’éradication de l’irrationalité, qui est bien commencée, on bosse là-dessus, remerciez-nous, etc. », tout le bla-bla des stérilisateurs fiers de l’être de ce monde. Ce monde appartient à tous, pas qu’à eux. Il est bien plus beau qu’ils ne voudraient nous le faire croire, si c’est nous qu’il faut d’abord changer pour changer le monde, c’est eux tout de suite après, soyons fous : en même temps ! Thérapie !
La religion donc a aussi sa petite méchanceté. Elle a Marie qui est au pinacle pour une forte part de la chrétienté, mais qui n’a pas les honneurs de la trinité, platonicienne, comme ça ce n’est pas de notre fait, c’est la loi de la nature que la femme reste à la porte, n’est-ce pas ? Ceci dit, encore un peu d’énervement, si on lit les textes chrétiens, Marie est bien proche de l’Isis, voire même adulée bien au-delà et dont tous les attributs sont ceux du mystère, du caché, etc. Elle a le poste, mais pas la paye, on va dire, c’est toujours le cas pour la femme d’ailleurs. Par contre avec Ève on peut se lâcher. L’ontologie est renversée puisque l’homme est premier, c’est de sa côte que nait une Ève presque subalterne (c’est technique, on en aura besoin après, pour avoir des fils), mais elle se rend utile comme coupable : avant elle c’était mieux, elle a tout gâché.
Ce texte, je l’ai craché une première fois et je n’ai pas osé le publier en l’état, trop d’affects, de pathos : je l’ai réécrit. Comme toujours, j’ai avancé en écrivant, c’est-à-dire que j’ai changé des affirmations la seconde fois parce que j’ai réfléchi mieux à ce que j’avais affirmé et j’ai eu la nette impression qu’une troisième écriture ne serait pas du luxe. Sur la race je n’ai pas fini, sur le sexe, je n’ai pas fini, etc. La psychologie de l’inné prend une place folle dans notre monde de tous les jours, mais pas dans la religion du temps, la Science. On a oublié qu’on vivait nos pensées, persuadés que la pensée est le commencement et la fin, ce bug platonicien qu’hier soir encore je vérifiais chez deux amis, l’un saltimbanque, l’autre professeur de mathématiques : « mais non, la pensée est première ! », quoique j’ai pu dire.
Une réponse sur “Psychologie de l’inné – 4”