La Grande Triade

Dernier ouvrage publié du vivant de René Guénon, La Grande Triade se carac­té­rise par un recours prépon­dé­rant aux tradi­tions extrême-orien­tales, parti­cu­liè­re­ment celles de la Chine et, avant tout, du taoïsme, que l’au­teur avait connues et dont il avait traité dès ses premiers écrits. Toute­fois, comme à son accou­tu­mée, il y fait aussi de nombreux paral­lèles et rappro­che­ments avec d’autres tradi­tions, tant orien­tales qu’oc­ci­den­tales : hindouisme, boud­dhisme, judaïsme, islam, chris­tia­nisme, franc-maçon­ne­rie, hermé­tisme, pytha­go­risme, Fidèles d’Amour, etc. De la sorte, La Grande Triade répond clai­re­ment au propos constant de René Guénon : expo­ser les données de la Tradi­tion primor­diale, notam­ment en souli­gnant les conver­gences entre toutes les tradi­tions authen­tiques. Même si, comme il le regret­tait, ce livre n’eut d’abord qu’un faible écho, y compris dans les milieux qui se récla­maient de la pensée tradi­tion­nelle, l’ou­vrage fit progres­si­ve­ment et discrè­te­ment son chemin, notam­ment parmi ceux qu’at­ti­rait l’Ex­trême-Orient.
René Guénon – La Grande Triade – Galli­mard

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Georges Ohsawa – Le Prin­cipe Unique

Georges Ohsawa – Le Prin­cipe Unique de la philo­so­phie et de la science d’Ex­trême-Orient

Le prin­cipe unique (la consti­tu­tion-concep­tion de la vie et de l’Uni­vers de l’Ex­trême-Orient) n’est en réalité qu’une méthode de clas­si­fi­ca­tion dialec­tique pratique et univer­selle, acces­sible à tout le monde, qui embrasse tout ce qui existe dans l’uni­vers et l’Uni­vers lui-même.
Georges Ohsawa

Yi-King et oracle

On peut abor­der le Yi-King de diffé­rentes façons. Fonda­tion de toute la culture chinoise, profond et origi­nal livre de la sagesse des jours, exposé d’on­to­lo­gie fonda­men­tale, oracle, et sans doute encore d’autres approches.

Oracle signi­fie quelque chose comme dispo­si­tif de contact avec la synchro­ni­cité. L’oracle n’est pas de la prédic­tion, il n’est un outil de déci­sion qu’in­di­rec­te­ment, par la compré­hen­sion du moment qu’il apporte. Fonda­men­ta­le­ment l’oracle nous dit ce que nous savions déjà, mais en isolant l’im­por­tant de tout ce que nous savions sans doute déjà au sein de la multi­pli­cité des hypo­thèses, avec leurs poten­tielles erreurs de juge­ments. Il donne du recul et change notre manière de consta­ter le réel, le moment que nous vivons.

Le Yi-King a un mode d’em­ploi subtil. Il étonne toujours celui qui sait s’y prêter. En tout cas c’est mon cas. Il m’a souvent servi de clari­fi­ca­teur (aide à la déci­sion, anti­dé­pres­seur) et même parfois tiré de situa­tions compliquées avec des gens pas clairs. Je ne suis pas un prosé­lyte de ce livre, je suis un esprit exigeant et ration­nel, capable d’ex­pé­riences de pensée et d’es­prit critique aussi bien sur elles que sur mes propres juge­ments. Et juste­ment : igno­rer l’ac­cu­mu­la­tion de constats surpre­nants, leur récur­rence même, ce ne serait pas très rigou­reux.

Ce que je dis ici est ce qui s’est imposé à moi, et qui conti­nue année après année, de ma pratique oracu­laire du Yi-King. Quasi­ment chaque tirage du Yi-King que j’ai effec­tué depuis peut-être 10 ou 15 ans à été un ensei­gne­ment lumi­neux du présent, de mon présent. Je n’y peux rien, c’est comme ça : quand je pratique un tirage selon mon rite, à chaque fois je reçois de la compré­hen­sion de mes problèmes du moment et du coup je ressors trans­formé. Je passe d’un « lieu » de pensée à un autre, c’est flagrant. C’est un dépay­se­ment qui ne fait pas quit­ter « le pays », mais le rend nouveau, plus vaste et plus riche de possi­bi­li­tés qu’il ne semblait au départ. J’in­siste sur l’adé­qua­tion subtile des tirages avec la situa­tion présente. Tout est là, c’est quand le message reçu est parfai­te­ment clair et adéquat qu’il procure le chan­ge­ment d’état d’es­prit.

L’œuvre des chinois est consi­dé­rable. Ils ont atteint, avec la sagesse des jours, l’ordre du monde.

Dans le Yi-King le passage du 4 (éléments) au 8 (dédou­ble­ment des 4 éléments donnant le trigramme) est basé sur le prin­cipe. Il faut noter que la posi­tion du Feu et de l’Air sont inver­sés, c’est une erreur. Ensuite, les chinois ont ré-appliqué le 8 au 8 en fondant l’hexa­gramme, qui est la somme de deux trigrammes. Ceci permet­tait de repré­sen­ter les 64 situa­tions qui se déga­geaient des études anté­rieures. Mais il est impor­tant de comprendre que le passage du 8 au 64 n’a pas été exac­te­ment réalisé selon la règle onto­lo­gique ou prin­ci­pielle, il a été réalisé analo­gique­ment selon l’ap­pa­rence de la repré­sen­ta­tion choi­sie arbi­trai­re­ment pour les trigrammes et hexa­grammes.

L’hexa­gramme se consti­tue de deux trigrammes, ce qui permet en théo­rie de faire une inter­pré­ta­tion tech­nique guidée unique­ment par l’on­to­lo­gie, mais ce n’est pas ce qui est arrivé, les chinois ont utilisé l’as­pect de la repré­sen­ta­tion, aspect méta­pho­rique, pour donner le sens de l’hexa­gramme. Vu aujourd’­hui c’est une dérive, une perte d’exi­gence sans doute justi­fiée par la diffi­culté tâche à réali­ser, qui était d’in­cor­po­rer les résul­tats tangibles (cara­paces de tortues) d’une pratique multi­mil­lé­naire en un système. Le flam­boyant succès de cette tâche permet d’en­vi­sa­ger l’on­to­lo­gie fonda­men­tale à un niveau bien supé­rieur à tout ce qui s’est fait depuis dans ce domaine.

La tâche ne pouvait alors être réali­sée qu’a­vec l’aide de la poésie et, c’est l’unique objet de cet article, ils sont parve­nus à un résul­tat abso­lu­ment prodi­gieux qui fait de ce livre l’unique ouvrage vrai­ment opéra­tion­nel de magie, accordé en toute confiance à l’har­mo­nie du monde.

On voit ici l’illus­tra­tion parfaite de la conduite de la recherche onto­lo­gique fonda­men­tale. Le résul­tat d’un travail dans ce domaine peut être enri­chis­sant même si la recherche comporte des erreurs ou des approxi­ma­tions fonda­men­tales. La condi­tion est l’hu­mi­lité et la capa­cité toujours nouvelle au doute.

On peut, on doit même, imagi­ner faire un jour la réécri­ture des 64 situa­tions selon la pure règle onto­lo­gique. Mais les athlètes de ce mode de pensée n’existent plus, cette science-racine est à réin­ven­ter sur le temps long. Rappe­lons nous que notre civi­li­sa­tion plafonne dans cette recherche à la quater­nité, et que dans sa néga­tion de l’ordre fonda­men­tal onto­lo­gique elle ne se rend même pas compte de la richesse fulgu­rante de ce palier qu’à défi­ni­ti­ve­ment fondé Aris­tote. Comment dans ce cas dépas­ser la sublime approxi­ma­tion de la sagesse chinoise à 64 situa­tions deve­nant qui plus est 4096 avec les traits chan­geants ?

Bren­tano – Aris­tote les diverses accep­ta­tions de l’être

Aris­tote les diverses accep­ta­tions de l’être
Franz Bren­tano

Quatrième de couver­ture

Cette disser­ta­tion légen­daire de Franz Bren­tano (1838–1917), éditée à Fribourg en 1862, prend pour fil conduc­teur de son inter­pré­ta­tion de la « méta­phy­sique » comme science de « l’être en tant qu’être » le leit­mo­tiv : « l’être se dit pluriel­le­ment ». Mais quelle en est alors la signi­fi­ca­tion directe et unitaire ?
L’am­bi­tion de Bren­tano est de recons­ti­tuer une doctrine dont il s’agit à la fois de montrer et de sauver la cohé­rence. Le primat accordé à l’ac­cep­ta­tion caté­go­riale de l’être amène à resti­tuer un « arbre généa­lo­gique » des caté­go­ries dont le chatoie­ment corres­pond stric­te­ment à la diver­sité des modes de prédi­ca­tion de la « substance première ». Même si la ques­tion reste posée de savoir si la pluri­vo­cité de l’être se ramène essen­tiel­le­ment à la diver­sité caté­go­riale, ou si, au contraire, les caté­go­ries n’illus­trent qu’une plura­lité restreinte, au sein d’une accep­ta­tion de l’être dont elles déclinent les « moda­li­tés » ou les « figures », mais dont rien ne dit qu’elle serait souve­raine, cette magis­trale initia­tion demeure un jalon incon­tour­nable dans l’his­toire de la réap­pro­pria­tion moderne d’Aris­tote et du problème que pose la consti­tu­tion d’une onto­lo­gie.

Traduit de l’al­le­mand par Pascal David, profes­seur à l’uni­ver­sité de Brest.

Vrin – Biblio­thèque des Textes Philo­so­phiques
208 pages –
ISBN 978–2–7116–1127–0 – décembre 1992

Usage ou recon­nais­sance du prin­cipe

Les philo­sophes peuvent se compor­ter de diffé­rentes façons par rapport au prin­cipe premier. Soit ils le nient, soient ils l’ignorent, soit ils le prennent pour objet en tant que fonde­ment de la méta­phy­sique. Mais tous emploient le prin­cipe formel quand il le faut.

Ma recherche de sources consiste à minima à rele­ver les usages clairs et nets du prin­cipe, qu’ils soient fait expli­ci­te­ment ou non par leurs auteurs. Ce niveau est assez proli­fique et s’est vu multi­plié avec le prin­cipe quater­naire d’Aris­tote.

Mon second niveau de recherche, aux décou­vertes bien plus clair­se­mées, est celui des textes citant le prin­cipe en tant que tel, et dont les auteurs recon­naissent l’exis­tence, admet­tant impli­ci­te­ment avoir une forme de croyance à ce sujet. Ce sont des gens comme Héra­clite, Aris­tote, Franz Bren­tano, Martin Heideg­ger et son unique commen­ta­teur en la matière, Jean-François Mattéi. Ceci n’est pas une liste d’au­teurs, c’est juste une lignée de penseurs sur le sujet, celle qui m’a fourni la clef entre ma recherche initiée sur le prin­cipe à la chinoise et la tradi­tion méta­phy­sique euro­péenne, cris­tal­li­sée sur la quadra­ture de l’étant aris­to­té­li­cienne.

Chez Kant, nous avons une posture excep­tion­nelle. Personne n’a sans doute jamais systé­ma­tisé le prin­cipe plus que lui, mais il semble pour­tant lui dénier la possi­bi­lité de l’exis­tence, tout en en parlant clai­re­ment.

On a trouvé suspect que mes divi­sions en philo­so­phie pure se trouvent presque toujours être tripar­tites. Mais c’est dans la nature des choses.

C’est trou­blant et devrait être étayé par une vraie recherche spéci­fique sur ce philo­sophe, ce qui n’est pas à ma portée : je ne peux que sortir de leur contexte des extraits qui me semblent parlants, mais qui peuvent très bien être plus complexes que ce que ma capa­cité peut admettre, ou encore contre­dits par ailleurs.

Des penseurs contem­po­rains conti­nuent à parler expli­ci­te­ment du prin­cipe, mais toujours subrep­ti­ce­ment au détour d’un sujet clas­sique ou encore de façon plus ou moins masquée. On voit appa­raître des expres­sions réser­vées qui ne sont rien d’autre que le voca­bu­laire codé de nos préoc­cu­pa­tions, telle que la dialo­gique d’Ed­gar Morin ou la différance de Jacques Derrida.