L’om­­ni­­po­­tence tota­­li­­taire de la Raison

C’est sans doute depuis Max Weber que les problèmes de notre temps sont nommé­ment asso­ciés à l’hy­per­tro­phie du ratio­na­lisme, nette­ment induite par la tenta­tion hégé­mo­nique de ses contemp­teurs sur la base de certaines graves faiblesses méta­phy­siques large­ment argu­men­tées chez Heideg­ger et d’autres. Cette expli­ca­tion du monde est sacré­ment juste et aurait dû nous mettre la puce à l’oreille, depuis le temps, mais elle est restée lettre morte, sans consé­quence, inutile.

Nier le réel ne l’a jamais fait dispa­raitre et d’autres, comme je l’ai fait, redé­couvrent forcé­ment cette expli­ca­tion du monde pour eux même, au centre de leurs vies et veulent le faire savoir, encore et encore, toujours, certains que la descrip­tion la plus élémen­taire et juste d’un problème permet le plus simple­ment d’en­vi­sa­ger un chemi­ne­ment vers sa solu­tion.

Je relève ici cette même pensée centrale, expri­mée par un fameux auteur/acteur de la réin­for­ma­tion géopo­li­tique fran­co­phone, écri­vain d’une fort belle ampleur, Philippe Gras­set du site Dede­fensa. Les mots sont les siens, mais la cause est univer­selle, recon­nais­sable sans aucune erreur :

J’en ai longue­ment parlé dans La Grâce, Tome-II (*), car je pense qu’il s’agit d’un malé­fice, – je pèse le mot pour ce qu’il vaut lorsqu’on explore par exemple les profon­deurs sombres et brûlantes du Mordor de Tolkien ; un malé­fice, dis-je, qui a complè­te­ment subverti notre pensée depuis la Renais­sance, en subver­tis­sant la raison (la raison-subver­tie) par la croyance dont elle (la Raison) s’est dotée comme l’on fait un coup d’État pour prendre le pouvoir, d’être la source de tout dans notre esprit, et par consé­quent d’être la clef du Tout, du Monde autant que du Cosmos. Nous avons cessé de penser comme les êtres pensaient jusqu’au Moyen-Âge, qui accep­taient comme par nature de ne pas réduire le domaine de l’es­prit à la seule Raison. La ques­tion qui est au cœur de cette quête, qui est aussi une enquête, n’est pas celle de la perti­nence de l’af­fir­ma­tion de l’exis­tence de Dieu (pour faire court et fort gros­sier, et hors de propos, mais chacun y pense dans cette sorte de débat parce que c’est si facile), – mais plutôt celle de la perti­nence de l’af­fir­ma­tion de l’om­ni­po­tence tota­li­taire de la Raison.

Il y a dans l’“esprit des modernes” depuis cette origine de la Renais­sance un inter­dit qui para­lyse la pensée en lui inter­di­sant certaines audaces d’ex­plo­ra­tion et de suppu­ta­tion.
Dede­fensa : Conver­sa­tion avec les “forces supra­hu­maines”

Je voudrais préci­ser, comme un indis­pen­sable pinaillage dont on se passe toujours, que l’em­ploi du terme de Raison est ici fautif. Elle n’est pas l’ac­teur hégé­mo­nique, elle est l’ou­til de l’hé­gé­mo­nie. Il faut parler non de la Raison, mais de l’en­semble cohé­rent des acteurs employant histo­rique­ment la Raison, la commu­nauté – ou l’égré­gore – ratio­na­liste, ou tout simple­ment le ratio­na­lisme par oppo­si­tion à la ratio­na­lité, etc., acteurs qui, possé­dant en commun une pratique, instru­men­ta­lisent consciem­ment ou non sa puis­sance dans ce qui devient, par paliers, un pouvoir de fait. Confondre les deux, même en connais­sance de cause, revient à consi­dé­rer expli­ci­te­ment la ratio­na­lité comme étant l’apa­nage des seuls ratio­na­listes dont il est ques­tion. Or rien n’est plus faux, la ratio­na­lité est un mode univer­sel du vivant parmi d’autres et ses outils sont univer­sels.

N’ou­blions pas que « La Reli­gion », avec des guille­mets indiquant la même nuance, s’est montrée elle-même sous ce jour d’au­to­rité auto-dési­gnée, conçue comme vérité ultime. C’est bien « elle » qui a combattu la montée ratio­na­liste des Lumières en la quali­fiant d’hé­ré­sie, l’as­so­ciant, non sans une certaine perti­nence analo­gique, qu’il faut abso­lu­ment consi­dé­rer avec d’in­fi­nies précau­tions, avec le mal, rappe­lant le terme de Mr Gras­set au début de l’ex­trait : le malé­fice, qui désigne l’ori­gine de cette problé­ma­tique. Mais en effet la Reli­gion n’est pas le lieu perdu, même si elle oeuvre d’abord en ce lieu. Aussi bien elle que la philo­so­phie on instru­menté le réel pour faire gran­dir l’hommme, puis se sont recroque­villées sur leur bases perçues comme indé­pas­sables.

Ceci étant dit, la descrip­tion est excel­lente, parfai­te­ment en accord avec tout ce que je défends ici, le style en plus. Descrip­tion fonc­tion­nelle de l’état du monde et de la direc­tion qu’il main­tient obsti­né­ment vers la déso­la­tion. Heideg­ger nomme cela d’une façon large « Oubli de l’Etre » et le fait remon­ter encore bien avant la Renais­sance, aux débuts de la méta­phy­sique. De ce mode du penser, opposé à celui de la Raison, nous avons galvaudé le nom pour en évacuer le sens premier. Ce nom est Sagesse et son exécu­teur porte son nom en bannière asso­cié à une notion qu’il est désor­mais bien en peine de ressen­tir pour elle, l’ami­tié.

Ce cœur du sujet marque une frater­nité de pensée qui ne demande qu’à se révé­ler, à se reven­diquer comme telle pour cesser de ne pas exis­ter.

Croire

Le discours théiste, ensei­gne­ment au long cours s’il en est, veut mener celui qui l’écoute à adop­ter certaines concep­tions qui sont données pour vraies ou abso­lues, mais sans qu’au­cune démons­tra­tion ne puisse jamais rien prou­ver. Le nom de Dieu désigne ainsi un être à jamais inaperçu, un être entiè­re­ment postulé qui sert de base au raison­ne­ment.

Il y a 100% de chance que quelque chose nous dépasse. Voilà l’es­sence de ma propre foi. Il y a 100% de chances que ce quelque chose qui nous dépasse soit ce que dési­gnent les diffé­rents noms du divin. Voilà l’es­sence de la foi reli­gieuse.

Dieu existe dans l’es­prit de l’homme pour mettre quelque chose sur le mystère de l’exis­tence. L’évoquer comme une entité du réel, c’est pouvoir oublier le gouffre, c’est donner sa confiance à une construc­tion première qui vient recou­vrir l’an­goisse d’un voile rassu­rant. En tant que tel le divin est une croyance fonc­tion­nelle, respec­table et utile. Ce ne sont pas les excès des reli­gions qui chan­ge­ront quoi que ce soit à ce fait cultu­rel haute­ment évolu­tif de l’hu­ma­nité, pas plus que la bombe atomique ne chan­gera l’ef­fec­ti­vité de la ratio­na­lité. Ne confon­dons pas la chose et l’usage de la chose.

Le fonc­tion­ne­ment du fait reli­gieux n’a rien d’ar­bi­traire, c’est un fonc­tion­ne­ment univer­sel. La science procède préci­sé­ment de la même manière : elle postule des faits invé­ri­fiables mais cohé­rents et construit par-dessus. Contrai­re­ment au reli­gieux qui n’est pas obli­ga­toi­re­ment tenu au doute, c’est une vraie faiblesse, le scien­ti­fique ne devrait jamais oublier la préca­rité intrin­sèque et perma­nente d’un postu­lat, il devrait savoir dès le début de la forma­tion que postu­lat est syno­nyme de croyance. Nous n’en sommes pas là, l’épis­té­mo­lo­gie, quand il y en a au cursus, est un sujet bâclé par tous les étudiants déjà hyper char­gés. C’est fina­le­ment la même faiblesse de l’ab­sence de doute, que l’on rencontre chez le scien­ti­fique et chez le reli­gieux, marque invi­sible qui mène évidem­ment au rigo­risme quand elle est géné­ra­li­sée, silen­cieu­se­ment ou non, à l’égré­gore.

La philo­so­phie est profon­dé­ment entre­la­cée avec la reli­gion comme le sont deux brins d’ADN. Elles se sont long­temps nour­ries l’une l’autre, car elles sont essen­tiel­le­ment de même nature méta­phy­sique. La diffé­rence clé de la philo­so­phie, c’est mis en place la véri­fi­ca­tion systé­ma­tique des règles devant les faits et par consé­quent l’in­ter­dic­tion rigou­reuse de la contra­dic­tion. La philo­so­phie a patiem­ment conquis ce que la reli­gion utili­sait déjà sans en maîtri­ser la puis­sance : la causa­lité. Le bascu­le­ment vers la ratio­na­lité qu’à produit la philo­so­phie était déjà compris en germe dans la reli­gion. Ainsi est née la science contem­po­raine, comme un accrois­se­ment sur la reli­gion, un pas géant rendu possible par le pas géant qui le précède.

Le problème de l’époque se retrouve entiè­re­ment dans l’ap­pré­hen­sion causa­liste de la formule logique de consé­quence : « si… alors… ». La condi­tion « si » des prémisses élémen­taires est rempla­cée, tout comme dans la reli­gion, par la certi­tude sans appui autre que l’ha­bi­tude ou l’évi­te­ment de l’os­tra­cisme. La formule causa­liste s’ex­prime désor­mais là où commence la science : « puisque… alors… » où la prémisse n’est plus mise en doute, ne peut plus être mise en doute à cause de l’édi­fice qu’elle supporte, reniant les véri­tables assises méta­phy­siques que sont le flou, l’in­cer­ti­tude première et le doute. C’est un problème d’ou­bli du réel qui n’a abso­lu­ment rien de conscien­cieux où nous ramène notre nature assoif­fée de sécu­rité et de récon­fort.

Tout dans la nature animée ou inani­mée se comporte suivant des règles, mais ces règles ne nous sont pas toujours connues. C’est en vertu de certaines lois que la pluie tombe et que les animaux se déplacent. Le monde entier n’est propre­ment qu’un vaste ensemble de phéno­mènes régu­liers ; en sorte que rien, abso­lu­ment rien, ne se fait sans raison. Il n’y a par consé­quent point d’irré­gu­la­ri­tés à propre­ment parler ; quand nous en croyons trou­ver, nous pouvons dire seule­ment que les lois qui régissent les phéno­mènes nous sont incon­nues.
Kant – Logique – Page 5

Ce que j’ai stabi­loté est l’hy­po­thèse de la logique. Celle-ci fonc­tionne pour ce que veut en faire la science, pas de problème de ce côté-là, elle taille à la science un terri­toire légi­time, net et tran­ché où la croyance n’a pas sa place. Mais la sèche formu­la­tion kantienne comporte l’as­pect hégé­mo­nique sous-jacent clas­sique en philo­so­phie depuis Parmé­nide, aspect qui ne remet pas en cause ce qu’elle isole, la logique, mais ce que les logi­ciens persistent à nier, le reste de l’iso­lat qui est impli­ci­te­ment et conti­nu­ment consi­déré par eux indif­fé­rem­ment soit comme du déchet soit comme inexis­tant, ce qui ne manque pas de sel. Le para­digme de la raison qu’é­pure inlas­sa­ble­ment toute la philo­so­phie est conçu par elle comme venant défi­ni­ti­ve­ment et tota­le­ment rempla­cer un fonc­tion­ne­ment anté­rieur erroné. Cette construc­tion ne tient ni dans le monde réel ni dans le cadre analo­gique tracé dans ce blogue. La règle n’est pas plus la cause des phéno­mènes que la carte n’est le terri­toire. La règle est un outil descrip­tif qui n’existe qu’en pensée et dont le réel n’a aucun besoin pour exis­ter, même si la posses­sion de la règle permet d’in­fluer sur le réel. La règle est rela­tive alors que Kant nous la montre comme un absolu, tout comme le font Hegel ou Platon. Une évolu­tion diffé­rente de l’hu­main, une autre forme de pensée que l’hu­maine, abou­ti­raient à des règles diffé­rentes. Et comment, philo­sophe, oublier que notre propre évolu­tion nous a déjà fait rempla­cer des règles « abso­lues » par d’autres ? Comment oublier que la science évolue, comment oublier que ses para­digmes peuvent chan­ger ?

Deux para­digmes – au moins – s’af­frontent. Le plus ancien, le reli­gieux, qui s’oc­cupe de l’amour d’abord et le scien­ti­fique qui s’oc­cupe de logique. Le chan­ge­ment de para­digme qu’at­tend notre monde n’est pas la victoire défi­ni­tive de l’un sur l’autre. Ce qu’at­tend notre monde c’est la recon­nais­sance des deux para­digmes, par les deux commu­nau­tés de croyants qui y sont atta­chées.

Et je cite effec­ti­ve­ment la commu­nauté des scien­ti­fiques comme une commu­nauté de croyants. Le monde chan­gera lorsque cette commu­nauté pren­dra ouver­te­ment conscience de ce fait indu­bi­table et qu’elle le mettra dans des textes consen­suels, à teneur méta­phy­sique ou idéo­lo­gique, qui restent à écrire (ce que croient les scien­ti­fiques) : si quelque chose nous dépasse dans le monde, alors aucune certi­tude abso­lue n’est possible. Affir­mer que tout a une cause revient à croire que toutes les causes, y compris « la » cause au départ de toutes les causes, seront un jour trou­vées par l’homme. Pourquoi pas. Mais il faut prendre les choses pour ce qu’elles sont, il s’agit là d’une croyance qui bien souvent est assé­née sous couvert de scien­ti­fi­cité, ce qui est très déran­geant.

Si la science est l’af­faire de tous, la croyance est affaire person­nelle. Quand la croyance est parta­gée par un grand nombre, alors de ce partage naissent les concepts et les rituels qui font une reli­gion. Cette reli­gion, au sens de relier, fait partie de ce que la commu­nauté scien­ti­fique ridi­cu­lise chez les autres et ignore pour elle-même, sans avoir conscience qu’elle y est irré­mé­dia­ble­ment juchée.

Tout le problème est exprimé dans ce constat : la reli­gion des scien­ti­fiques n’est inscrite nulle part, elle n’est même jamais nommée, si ce n’est sous le terme priva­tif d’athéisme, c’est à dire se défi­nis­sant unique­ment sur la néga­tion de ce qui n’est pas elle. Nietzsche quali­fiait à juste titre ce compor­te­ment de nihi­lisme.

Le contraire de la disci­pline

Si on pose cette ques­tion a quelques intel­li­gentes personnes,

il nous est répondu une pléthore de mot conte­nant tous la racine « disci­pline », à commen­cer par l’in­dis­ci­pline, vue comme désordre, quand les autres propo­si­tions se voient toutes comme construc­tives, mais souten­dant en fait un ordre arbi­traire et erroné. Pluri-, multi-, méta-, -para, etc., on cherche sans grand succès à réunir des branches exis­tantes plutôt qu’à déce­ler ce qui est commun à toutes les disci­plines. Ainsi, sauf le premier nommé, tout contraire de la disci­pline est toujours disci­pli­naire.

Quelles que soient les approches « non disci­pli­naires » évoquées, le cher­cheur voit toujours au final le surajout d’une tâche, celle de connaître un ou plusieurs autres secteurs que le sien propre. C’est extrê­me­ment diffi­cile, même pour des très hauts QI.

A aucun moment on envi­sage ce qu’est le contraire de la disci­pline qui est à sa créa­tion même, qui l’ali­mente perpé­tuel­le­ment en matière vitale et vivante.

Disci­pline
Jeu

L’ordre du Monde est entiè­re­ment dans le Jeu. C’est pourquoi nous pouvons penser à l’équa­tion analo­gique comme à un jeu, une acti­vité procu­rant le plai­sir de la décou­verte par soi même du réel.

Merci Jean, cette réponse demeure.

Oubli de l’Etre

Heideg­ger n’a rien contre la tech­nique ni contre le plato­nisme, il estime seule­ment que la construc­tion d’un être qui serait soumis d’em­blée à une visée comp­table de ratio­na­li­sa­tion vient peut être obnu­bi­ler l’ex­pé­rience du don gratuit de l’être, qui éclôt sans pourquoi.

De là l’idée heideg­gé­rienne – très simple au fond – d’un oubli de l’être qui aurait marqué toute la méta­phy­sique. Il ne s’agit pas d’une thèse sur un thème qui aurait été malen­con­treu­se­ment oublié dans les manuels de méta­phy­sique, mais d’un juge­ment porté sur la concep­tion tech­ni­cienne de l’être qui ensor­celle autant notre temps. Concep­tion qui a ses raisons et ses succès, mais qui tend à réduire l’être à l’ordre du produc­tible, camou­flant ainsi l’in­dis­po­ni­bi­lité plus ancienne de l’être.
Heideg­ger L’énigme de l’être pages 66–67

Le malaise de certains inter­prètes et lecteurs de Heideg­ger devant la figure du Quadri­parti, pour ne rien dire de l’in­dif­fé­rence des autres, témoigne de l’in­ca­pa­cité de la raison moderne d’ac­cueillir une parole qui échappe à toutes ses caté­go­ries.
Jean François Mattéi – L’ordre du monde page 198

La pensée ne commen­cera que lorsque nous aurons appris que cette chose tant magni­fiée depuis des siècles, la raison, est la contra­dic­tion la plus achar­née de la pensée.
Idem, page 191

Je postule que, par pensée, Heideg­ger veut dire sagesse. C’est le seul moyen de voir clair, même si pour Platon, pensée s’ac­corde à raison et intel­lect à sagesse.

L’asy­mé­trie céré­brale – Contro­verse

Roger Sperry décrit notam­ment le rôle singu­lier de chaque hémi­sphère céré­bral dans la percep­tion du langage et de l’es­pace, dans la recon­nais­sance des visages, les juge­ments de valeurs, le raison­ne­ment ou l’af­fec­ti­vité. Il va jusqu’à formu­ler l’hy­po­thèse que chaque hémi­sphère dispo­se­rait de fonc­tions propres, voire d’une conscience propre.
Si son œuvre est incon­tour­nable en psycho­bio­lo­gie, l’im­pli­ca­tion qu’elle entraîne dans les liens entre le physique et le psychique, font que ses posi­tions philo­so­phiques ont choqué.

Bien sûr c’est ce qui a choqué qui nous inté­resse. L’hy­po­thèse ci-dessus est souvent décriée, le plus souvent au moyen d’ar­gu­ments non pas scien­ti­fiques, mais affec­tifs. En effet, comment prou­ver l’inexis­tence de quelque chose ? Quand l’épis­té­mo­lo­gie s’ef­fondre, il reste la violence ou la ruse.

Cepen­dant, de façon pure­ment quan­ti­ta­tive, une fonc­tion peut mobi­li­ser de façon plus éten­due une région d’un hémi­sphère plutôt qu’un autre. Il y a alors un biais en faveur d’un hémi­sphère céré­bral, mais il n’existe pas de laté­ra­li­sa­tion totale. La plupart des tâches néces­sitent la colla­bo­ra­tion des deux hémi­sphères céré­braux. Il n’existe donc pas véri­ta­ble­ment d’asy­mé­trie fonc­tion­nelle entre les deux hémi­sphères céré­braux.

Le surli­gnage en jaune nous ramène exac­te­ment à la propriété élémen­taire du couple yin yang, notre réfé­rence : jamais l’un sans l’autre.

Par contre la déduc­tion en surli­gnage rouge est fautive. Elle sous-entend que si la laté­ra­li­sa­tion n’est pas totale, c’est qu’elle n’est pas véri­table. Epis­té­mo­lo­gique­ment ça ne tient pas, c’est de la rhéto­rique. Le commen­ta­teur ajoute une notion que l’au­teur n’a pas mise, l’as­pect tran­ché, qui est pour­tant contre­dit dans la phrase précé­dente. C’est un déni postu­ral maquillé dont le simple survol donnera à penser que logique­ment l’asy­mé­trie n’existe pas.

Pour qu’elle fonc­tionne je l’ai modi­fiée en :

Il n’existe donc pas véri­ta­ble­ment d’asy­mé­trie fonc­tion­nelle totale entre les deux hémi­sphères céré­braux

Du coup c’est une para­phrase qui n’ap­porte rien, ou encore un truisme.

l’asy­mé­trie céré­brale est complexe et déli­cate, et nous empêche de tirer des conclu­sions globales

Voilà qui est mieux.

Je trouve cet exemple bien repré­sen­ta­tif des actions contre l’hy­po­thèse de Sperry, c’est pourquoi je le conserve ici alors que j’ai corrigé sur Wiki­pé­dia.

Certains sites se font les chantres de ce type de l’in­com­pré­hen­sion épis­té­mo­lo­gique qui abrite des postures a priori ne faisant aucu­ne­ment l’hon­neur de la Science. Peu ou pas de philo­so­phie, inca­pa­cité notoire à penser en dehors des manuels de réfé­rence, révé­rence aveugle aux dogmes scien­ti­fiques sont quelques unes de leurs carac­té­ris­tiques les plus appa­rentes. D’ailleurs ces sites n’ouvrent jamais leurs billets aux commen­taires, ce qui est perti­nent car aucune critique n’est rece­vable pour eux, qui se déter­minent juste­ment commes impa­rables, ados­sés qu’ils sont aux résul­tats de la science comme vérité abso­lue, mais jamais à ses doutes, ses erre­ments ni même son évolu­tion.

La média­ti­sa­tion des « cerveau droit » et « cerveau gauche »

En 2013, une analyse scien­ti­fique rigou­reuse par IRM montre qu’il ne semble pas exis­ter de prédo­mi­nance hémi­sphé­rique d’un indi­vidu à l’autre d’un point de vue fonc­tion­nel. Cela ne remet pas en cause l’exis­tence d’une laté­ra­li­sa­tion des fonc­tions cogni­tives, mais cette recherche montre qu’il ne semble pas exis­ter d’in­di­vi­dus à cerveau gauche ou cerveau droit domi­nant.

La critique ici est plus respec­table. L’ou­trage épis­té­mo­lo­gique (une ou plusieurs expé­rience néga­tive ne suffisent pas à inva­li­der la thèse) est évité par l’usage deux fois répété du verbe sembler qui indique la fragi­lité de l’af­fir­ma­tion devant ses préten­tions d’analyse scien­ti­fique rigou­reuse, qui sait avant même d’exis­ter qu’elle ne prou­vera rien. Cette asser­tion « vrai­sem­blable » vient essayer de contrer le fait carac­té­ro­lo­gie sans aucun argu­ment, mais en semant le doute. Rhéto­rique encore.

Brau­del

Fernand Brau­del réclame l’uni­fi­ca­tion des sciences sociales.

« Mais elle répond chez moi à un désir d’uni­fi­ca­tion, même auto­ri­taire, des diverses sciences de l’homme, pour les soumettre moins à un marché commun qu’à une problé­ma­tique commune, qui les libè­re­rait de quan­tité de faux problèmes, de connais­sances inutiles et prépa­re­rait, après les élaguages et mises au point qui s’im­posent, une future et nouvelle diver­gence, capable alors d’être féconde et créa­trice. Car un nouveau lance­ment des sciences de l’homme s’im­pose.
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 105

Evidem­ment, j’abonde. Pour toutes les sciences.

Brau­del ignore l’a priori quadri­parti ou même triparti.

L’his­toire se situe à des paliers diffé­rents, je dirais volon­tiers trois paliers, mais c’est façon de parler, en simpli­fiant beau­coup. C’est dix, cent paliers qu’il faudrait mettre en cause, dix, cent durées diverses.
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 112

Il ne cherche donc pas à confron­ter sa pensée au contact de la typo­lo­gie quadri­par­tie aris­to­té­li­cienne, ni ne cherche à en isoler les traits.

Pour­tant on discerne bien l’ac­crois­se­ment clas­sique avec le temps court ou long comme trait alpha, ainsi que son pendant socio­lo­gique.

Histoire

Trait alpha
Long
Temps
Court

Socio­lo­gie

Trait alpha
Diachro­nie
Synchro­nie

Puis nous avons les paliers, au nombre de trois, donc : événe­ment, conjonc­ture et struc­ture. On peut tenter un clas­se­ment comme tripli­cité, avec l’af­fir­ma­tion : « la conjonc­ture va de l’évé­ne­ment à la struc­ture », ce qui ne manque pas d’in­té­rêt, mais sans être en accord avec Brau­del. Essayer une quater­nité implique de trou­ver un terme manquant. Ressort de la lecture un candi­dat :

Le fait divers (sinon l’évé­ne­ment, ce socio­drame) est répé­ti­tion, régu­la­rité, multi­tude, et rien ne dit, de façon abso­lue, que son niveau soit sans ferti­lité ou valeur scien­ti­fique. Il faudrait y regar­der de près.
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 113

Cela nous rappelle immanqua­ble­ment l’ou­bli de l’être. Dés lors, je pose cette équa­tion comme une expé­rience, postu­lant l’ou­bli du premier palier par l’his­toire :

Brau­del

Struc­ture
Conjonc­ture
Evéne­ment
Fait divers
Finale
Motrice
Formelle
Maté­rielle

Le mot de palier est sorti de la pensée de Georges Gurvitch et s’ac­cli­mate, tant bien que mal, chez nous. Nous dirons qu’il y a des paliers de la réalité histo­rique, plus encore des paliers de l’ex­pli­ca­tion histo­rique et par suite des paliers possibles de l’en­tente ou de la polé­mique histo­rico-socio­lo­gique : on peut se dispu­ter ou se récon­ci­lier en chan­geant d’éta­ge…
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 108

Le vaste édifice social de Georges Gurvitch selon cinq archi­tec­tures essen­tielles : les paliers en profon­deur, les socia­bi­li­tés, les groupes sociaux, les socié­tés globales, les temps, ce dernier écha­fau­dage, celui des tempo­ra­li­tés, le plus neuf, étant aussi le dernier construit et comme surajouté à l’en­semble.
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 118

L’étage premier est dénommé les profon­deurs, c’est très évoca­teur des commen­ce­ments et c’est cité en premier, je ne vois pas d’équi­voque ici. Par ailleurs, on retrouve fidè­le­ment la mise en place de la struc­ture penta­dique selon Heideg­ger : le quadri­parti est contenu dans un cinquième concept qui l’en­globe. La signa­ture de la quater­nité coule de source puisqu’elle est ordon­née.

Gurvitch

Les socié­tés globales
Les groupes sociaux
Les socia­bi­li­tés
Les paliers en profon­deur
Finale
Motrice
Formelle
Maté­rielle

François Simiand, citant Paul Lacombe, en tombait d’ac­cord et repre­nait à son compte l’af­fir­ma­tion de l’his­to­rien : « Il n’est pas de fait où ne puisse se distin­guer une part d’in­di­vi­duel et une part de social, une part de contin­gence et une part de régu­la­rité ».
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 102

J’ai pensé là à de beaux traits.

Histoire

Trait alpha
Régu­la­rité
Contin­gence
Trait bêta
Social
Indi­vi­duel

L’his­toire s’est employée dès lors, à saisir les faits de répé­ti­tion aussi bien que les singu­liers, les réali­tés conscientes aussi bien que les incons­cientes.
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 103

Histoire

Trait alpha
Répé­ti­tion
Faits
Singu­liers
Trait bêta
Cons­cientes
Réali­tés
Incons­cientes

Le struc­turé et le non struc­turé, os et chair du social
Fernand Brau­del – Écrits sur l’his­toire, page 102

Histoire

Trait bêta
Struc­turé
Non struc­turé

Réca­pi­tu­la­tif des traits

Trait alpha
Temps long Diachro­nie Régu­la­rité Faits de répé­ti­tion
Temps court Synchro­nie Contin­gence Faits singu­lier

Trait bêta
Social Réali­tés conscientes Struc­turé
Indi­vi­duel Réali­tés incons­cientes Non struc­turé

Réca­pi­tu­la­tif du quater­naire

Struc­ture
Conjonc­ture
Evéne­ment
Fait divers
Les socié­tés globales
Les groupes sociaux
Les socia­bi­li­tés
Les paliers en profon­deur

Jean François Mattéi – L’ordre du monde

On peut dire que dans ce livre Mattéi se laisse aller à moins de rete­nue que d’ha­bi­tude. La quatrième de couver­ture donne une idée de cela :

L’ordre du monde : l’ex­pres­sion paraî­tra suspecte à ceux qui ont choisi le vide du concept contre la pléni­tude du sens et refusent à la raison moderne le droit de recon­naître sa quadruple racine pour édifier une éthique à la mesure de l’être.

C’est de la colère.

On peut bien, aujourd’­hui, oublier l’injonc­tion carté­sienne de chan­ger plutôt ses désirs que l’ordre du monde, et se satis­faire, Ciel et Terre abolis, d’une raison qui achève son empire sur un désert. C’est toujours le monde, fina­le­ment, qui a le dernier mot.

Et du pessi­misme, de l’im­puis­sance qui fait écho au désar­roi de Heideg­ger face à l’in­com­pré­hen­sion.

C’est encore un ouvrage clé pour moi. Celui ci m’a montré qu’une colère sourd de cette lignée d’éru­dits. Elle me les rend plus réels. Le contenu de ce livre revient inlas­sa­ble­ment sur le problème de l’ou­bli de l’Être, conju­gué en « Oubli de l’ou­bli de l’Être » par le contem­po­rain qui semble admi­rer Heideg­ger, mais l’en­ferme dans une parfaite incom­pré­hen­sion de son œuvre.

J’ai enfin vrai­ment compris par ce livre que j’avais des frères en pensée, sorte de consé­cra­tion de 20 années de recherches. J’ai aussi pu oser appo­ser la signa­ture de l’Ordre et du Désordre, notion au centre du monde depuis Zoroastre, fonda­teur du premier des mono­théismes.

J’em­prunte désor­mais l’ex­pres­sion « L’ordre du monde » en fondant sa légi­ti­mité sur ce livre, œuvre d’un ami en pensée.

Inter­ro­gez l’Être !

« Inter­ro­gez l’Être ! Et dans son silence – entendu comme le lieu de nais­sance de la parole – répond le dieu. Vous avez beau ratis­ser tout l’étant, nulle part ne se montre la trace du dieu. »

Le lieu de l’Être est aussi le lieu du divin. Le divin est inté­rieur, il est la source en nous qui est, jaillis­sant dans l’in­tui­tion. Ce lieu est dési­gné par la « synchro­ni­cité » de Jung, ou encore par le « ça » freu­dien. C’est l’ir­ra­tion­nel.

Chez Heideg­ger, la place des dieux est vue comme supé­rieure, trans­cen­dante alors qu’elle est imma­nente. Cela conduit à un problème de lisi­bi­lité quand on tente de signer sa quater­nité prin­ci­pale.

Le drame de cette intel­li­gence tech­nique est qu’elle se coupe de tout lien à un ordre supé­rieur. C’est cet ordre, cette mesure que vient fina­le­ment poin­ter le thème de l’être et de son oubli.

Or il vaut mieux dire que cet ordre est à la fois infé­rieur, anté­rieur, premier.

Synchro­ni­cité

La synchro­ni­cité est une appel­la­tion de Carl Gustav Jung. Elle évoque les événe­ments à la fois haute­ment impro­bables et char­gés de sens, qui surgissent le plus souvent dans la vie des gens aux moments de forte impli­ca­tion dans le quoti­dien.

Une personne chère me laisse un livre à elle en insis­tant lour­de­ment pour que je le lise, ceci pour­tant malgré mon refus motivé du thème. Des mois plus tard, je lui rend le livre que je n’ai pas même ouvert, le lui disant. Peu de temps après, une occa­sion se présente à elle de me faire un petit cadeau. Je déballe et je trouve encore une fois ce livre, neuf, puisqu’elle l’a racheté pour l’oc­ca­sion. Mon regard se fait critique devant le peu de consi­dé­ra­tion dont elle fait preuve à cet égard. C’est comme un acte manqué. Machi­na­le­ment, j’ouvre le livre et je suis surpris. Je le feuillette avec incré­du­lité et mon visage désor­mais affiche une franche hila­rité : toutes les pages du livre sont entiè­re­ment blanches ! en dehors de la couver­ture, rien n’est imprimé !

« Je t’avais bien dit que je ne voulais pas le lire ! Tu vois, il est d’ac­cord ! »

La notion de synchro­ni­cité recouvre aussi ce que l’on appelle parfois « trans­mis­sion de pensées ».

Je me réveille bruta­le­ment en pleine nuit sans raison. Je m’as­sois, regarde le télé­phone. J’at­tends quelques secondes. Sonne­rie, je décroche, c’est elle, elle est très en colère. Je me suis réveillé au moment précis ou elle a décidé de m’ap­pe­ler. Cette histoire est arri­vée deux fois en peu de temps.

Tout le monde connait des moments étranges de ce genre. Il est plus que probable que la croyance la plus ancienne en des êtres supé­rieurs découle direc­te­ment d’ob­ser­va­tions récur­rentes de ce type de phéno­mène, qui donnent forte­ment l’im­pres­sion qu’une intel­li­gence exté­rieure et nous dépas­sant est à l’œuvre. En réalité, il faudrait parler non d’une intel­li­gence exté­rieure à l’ob­ser­va­teur de la synchro­ni­cité, mais d’une certaine intel­li­gence inté­rieure. La synchro­ni­cité vécue n’est pas causale, même selon le mysti­cisme : elle n’in­dique pas une desti­née ou quelque chose d’im­muable ; elle indique que l’on est en train de vivre inten­sé­ment quelque chose avec le monde qui nous entoure, dont elle nous révèle l’im­por­tance par une espèce d’éclair de génie toujours renou­velé. Spécu­ler sur ce génie est l’oc­cu­pa­tion des reli­gions. On peut se défi­nir Sans-Dieu, on peut même réfu­ter tous les dieux, mais on ne peut évacuer le phéno­mène qui a présidé à leur nais­sance dans l’es­prit de l’homme. Les reli­gions sont des doigts qui dési­gnent une lune, la synchro­ni­cité jungienne aussi ; elles sont critiquables, mais la lune, étrange et mysté­rieuse, existe bel et bien.

Même si elle semble logique­ment être la mère de tous les mysti­cisme, la synchro­ni­cité n’est pas mira­cu­leuse ni magique ; elle est le réel en acte. Elle ne peut ni être prou­vée, ni être provoquée, mais elle ne peut non plus être réfu­tée sans être aveu­glé par son impos­si­bi­lité théo­rique causa­liste. Ses carac­té­ris­tiques nous font immanqua­ble­ment penser à la simul­ta­néité prévue par Einstein et démon­trée par A. Aspect, de l’in­tri­ca­tion quan­tique (quand deux parti­cules intriquées sont sépa­rées, elles restent corré­lées : si l’on change le spin de l’une, le spin de l’autre est modi­fié en même temps, peu importe la distance les sépa­rant).

Le terme de synchro­ni­cité désigne un ordre imma­nent incom­pré­hen­sible par la raison, mais qu’il est pour­tant possible de perce­voir. Certains peuvent même imagi­ner influer sur cet ordre en se mettant dans certaines dispo­si­tions d’es­prit de récep­ti­vité. Il est des plus inté­res­sant d’en­vi­sa­ger que le Yi-King chinois, vu comme instru­ment de divi­na­tion, est en quelque sorte un parfait mode d’ac­cès à cet ordre. Mais encore une fois, cette synchro­ni­cité provoquée du Yi-King, quand elle est réus­sie, n’est pas la divi­na­tion de ce qui doit adve­nir, c’est une indi­ca­tion de ce qui se passe présen­te­ment pour qu’é­ven­tuel­le­ment le récep­teur puisse influer sur le futur. En quelque sorte, le tirage du Yi-King nous apprend ce que nous savons déjà, mais en isolant le plus impor­tant de tout ce que nous savions déjà. L’ap­proche du Yi-King, sous l’angle oracu­laire, est un éclai­rage satis­fai­sant de la synchro­ni­cité.

De nombreuses personnes vivent, le plus souvent qu’il leur est possible, sous le signe de la synchro­ni­cité, sans même connaître ce terme. Ce type d’at­ti­tude est une foi qui ne se dit pas néces­sai­re­ment dans une reli­gion, même si, visi­ble­ment, toute reli­gion commence par là. Ce que Jung nomme « synchro­ni­cité », ce que les chré­tiens nomment « Provi­dence » et les boud­dhistes « karma », sont des mani­fes­ta­tions rigou­reu­se­ment inex­pli­cables par la science, mais indu­bi­tables parce que le plus souvent analo­gique­ment limpides pour tout obser­va­teur, malgré une proba­bi­lité abso­lu­ment infime qu’elles se produisent par la loi du chaos. C’est tout simple­ment un phéno­mène natu­rel et même presque banal pour certains, habi­tués à ce mode de penser. Dans l’exemple cité plus haut, fina­le­ment le livre n’est pas imprimé, ce qui corres­pond sans équi­voque pour quiconque à mon refus de le lire ; la proba­bi­lité de rencon­trer à notre époque ultra-tech­ni­ci­sée un livre non imprimé par erreur est déjà extrê­me­ment faible en soi ; cette proba­bi­lité rappor­tée au sens de l’his­toire que j’ai vécue devient tech­nique­ment nulle.

Jung fait une propo­si­tion des plus inté­res­sante : il met en rela­tion la causa­lité scien­ti­fique et la synchro­ni­cité, comme étant oppo­sées et complé­men­taires.

La désin­té­gra­tion radio­ac­tive est appa­rue comme un effet sans cause, donnant à penser que la causa­lité n’est pas la loi ultime de la nature

La réso­nance analo­gique est parfaite pour nous, avec de grands thèmes clas­siques.

Dyade
Causa­lité
Synchro­ni­cité
4 dyades
Diachro­nie Série
Synchro­nie Paral­lèle

Psycho­lo­gie de l’inné

Vous n’avez jamais encore rencon­tré ces deux mots ensemble et c’est trou­blant. La psycho­lo­gie scien­ti­fique est auto­ma­tique­ment syno­nyme de psycho­lo­gie de l’ac­quis et aucune branche étudiant expres­sé­ment quelque chose d’inné chez la personne n’existe aujourd’­hui. C’est un point aveugle de la science.

Certaines tendances contem­po­raines se récla­mant de la raison semblent même affir­mer que l’hu­main naitrait sans aucune spéci­fi­cité d’ordre psycho­lo­gique. Ce sont des choses assé­nées en géné­ral avec une certaine violence qui inter­dit toute remise en cause de ce qui ressemble du coup à un dogme. Nous sommes face à ce qui ressemble à un combat à mort entre deux reli­gions enne­mies : innéisme contre tabula rasa. Pour­tant plusieurs sciences, dont les neuros­ciences, ne cessent de contre­dire la réfu­ta­tion nihi­liste de toute psycho­lo­gie de l’inné. Une chose est certaine, aucune disci­pline fondée sur la psycho­lo­gie de l’inné n’existe ni n’est ensei­gnée au sein de l’uni­ver­sité. La posture innéiste, bien que parfai­te­ment justi­fiée, reste avant tout scan­da­leuse.

Je relève trois ou quatre disci­plines psycho­lo­giques ou l’in­néité devrait faire consen­sus par le simple usage du bon sens, c’est-à-dire de la raison elle-même. Il s’agit de la diffé­rence entre sexes (à ne pas confondre avec le genre), il s’agit ensuite de ce que pointe la notion de Q.I. et de ce que pointe la carac­té­ro­lo­gie dont je parle beau­coup dans ce blogue. Je pour­rais ici ajou­ter une quatrième disci­pline, plus déli­cate à esti­mer, encore plus scan­da­leuse que les autres, puisque sa simple évoca­tion en tant qu’objet d’étude l’as­so­cie auto­ma­tique­ment à l’eu­gé­nisme et aux atro­ci­tés commises lors des guerres humaines. C’est la diffé­rence psycho­lo­gique entre races, tabou d’au­tant plus impro­nonçable que des exac­tions se perpé­tuent tous les jours sur notre planète en son nom sans qu’on supporte de les regar­der autre­ment que cour­rou­cés, depuis l’op­por­tu­niste posture de la vertu outra­gée face à un inex­pli­cable forfait.

Le sexe. Le fémi­nisme s’est emparé de cette notion et l’a distor­due pour préten­du­ment recti­fier des millé­naires d’injus­tice. Je ne remets pas en cause le diagnos­tic fémi­niste d’injus­tice. Je suis pro-fémi­nisme dans ce sens-là. Mais le remède imposé par la force me parait tota­le­ment déplacé et dange­reux, d’au­tant plus qu’un certaine poli­tique honteu­se­ment mani­pu­la­toire s’en est empa­rée, retour­nant de l’in­té­rieur un mouve­ment des plus perti­nent, l’am­pli­fiant dans ce qu’il a de plus injus­ti­fié contenu dans cette simple affir­ma­tion « On ne nait pas femme, on le devient » qui désigne certai­ne­ment une réalité, mais qui affirme violem­ment sans jamais rien démon­trer (c’est impos­sible, d’où la violence systé­ma­tique) qu’au­cune diffé­rence psycho­lo­gique n’existe entre fille et garçon. C’est une catas­trophe de la raison dévoyée.

J’étu­die à peine la méta­phy­sique du sexe, c’est trop compliqué, dange­reux, c’est trop diffi­cile de trou­ver des sources qui ne tombent pas soit dans les travers du machisme histo­rique, soit dans ce stupide nihi­lisme vengeur qu’est devenu le fémi­nisme contem­po­rain. Je crois que l’étude de la méta­phy­sique formelle, et celle du carac­tère inné sous son éclai­rage, nous permet­tront avec le temps de discer­ner ces choses auxquelles nous ne sommes pas encore prêts. En atten­dant un petit livre de gare est notre meilleure source (en fait la seule à ma connais­sance) dans ce domaine : Mars et Venus par John Gray.

Le Q.I. devient de plus en plus popu­laire, mais il reste contro­versé par défi­ni­tion. La faculté de psycho­lo­gie ne l’a pas encore mis à son programme. Régu­liè­re­ment, de grands surdoués média­tiques viennent démon­trer qu’ils n’ont rien étudié à ce sujet en venant nier son exis­tence avec des argu­ments creux de pseudo-huma­nisme pour­tant large­ment remis en place par cette recherche déjà cente­naire. Nihi­lisme encore, fonde­ment épis­té­mo­lo­gique proche du néant encore.

La carac­té­ro­lo­gie a été une science jusque dans les années 1960. Elle n’a pas connu d’acte de décès ni d’orai­son funèbre, mais elle n’existe plus pour la faculté. Dépas­sée ?, ah bon, dépas­sée par quoi ? Dans les faits nulle part plus que pour cet objet scien­ti­fique la méta­phore du doigt et de la lune ne peut être plus justi­fiée qu’ici. Le carac­tère psycho­lo­gique inné des personnes est inlas­sa­ble­ment dési­gné selon des dizaines de doigts qui, fait trou­blant, ne se connaissent offi­ciel­le­ment pas les uns les autres et qui donc jamais ne tentent le rappro­che­ment entre eux. Le forma­lisme méta­phy­sique comble cette lacune en les rendant tous compa­tibles, recti­fiant parfois les erreurs des cher­cheurs.

La race !, pour avoir écrit ce mot il se peut que ce blogue soit mis à l’in­dex pour outrage aux bonnes mœurs par les insti­tu­tions et même par les moteurs de recherches. C’est une recherche déli­cate, minée même pour qui voudrait commu­niquer sur des résul­tats. La pensée auto­ma­tique de l’époque est tendue vers ce but : nier la race parce que dès qu’on en parle on est mal vu, même si l’on est scien­ti­fique, surtout si l’on est scien­ti­fique. Aucun raison­ne­ment n’entre en jeu ici, aucun juge­ment, même pas de l’opi­nion, juste de l’au­to­cen­sure.